Le gouvernement veut s'attaquer à la "porosité" entre délinquance et radicalisation

Édouard Philippe s'est exprimé à Strasbourg jeudi.
Édouard Philippe s'est exprimé à Strasbourg jeudi. © FREDERICK FLORIN / AFP
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avec AFP , modifié à
Le Premier ministre a présenté une initiative pour s'attaquer plus tôt à la délinquance, qui "peut conduire" à la radicalisation. 

Après un plan contre la radicalisation djihadiste l'an dernier, une initiative pour mieux s'attaquer aux racines de la délinquance en général en 2019 : Édouard Philippe a affiché jeudi sa volonté de s'attaquer de front aux deux sujets, en pointant leur "porosité". Au terme d'une concertation qui doit durer d'ici l'été, le gouvernement va mettre en place "une nouvelle stratégie" de prévention de la délinquance. Il s'agira notamment d'intervenir de façon "plus précoce", là où la précédente stratégie ciblait les 12-25 ans, a expliqué le chef du gouvernement lors d'un comité interministériel organisé à Strasbourg.

"Je ne dis pas que la délinquance conduise nécessairement au terrorisme", mais il s'agit "d'être lucide sur la porosité qui peut conduire de l'un à l'autre". "Il peut exister un continuum entre la délinquance, la radicalisation et le terrorisme", a-t-il plaidé.

Une concertation d'ici l'été. Pour Édouard Philippe, le constat est simple : "Nous devons intervenir plus tôt et plus vite", quitte à élargir la prévention de la délinquance à des enfants de moins de 12 ans. Et être présent "là où les jeunes se trouvent" : sur internet et les réseaux sociaux, dans la rue ou les salles de sport. S'il a assuré, là aussi, de sa volonté de mettre l'éducatif avant le répressif, le gouvernement a déjà mis sur la table une révision, d'ici l'été, de l'ordonnance pénale des mineurs, sujet politiquement explosif.

Ces dernières années, les infractions commises par des mineurs se sont orientées à la baisse, mais les experts s'inquiètent d'une tendance à l'aggravation des infractions commises et au rajeunissement de leurs auteurs, selon un récent rapport parlementaire. La nouvelle stratégie visera également à donner aux "acteurs locaux" (maires, associations...) les "moyens d'intervenir auprès de ces jeunes et de leurs familles", a promis Édouard Philippe. Les résultats de la concertation sont prévus avant l'été 2019, avec à la clé de premières expérimentations.

Un plan présenté quatre mois après l'attentat de Strasbourg. Le choix de la capitale alsacienne pour présenter sa stratégie ne tient pas au hasard, quatre mois jour pour jour après l'attentat qui a endeuillé le marché de Noël, faisant cinq morts. Pour le gouvernement, l'auteur de la tuerie djihadiste est une illustration d'une "dérive dans la délinquance, qui se transforme en dérive dans la radicalisation". Élève très tôt violent - signalé par l'Education nationale dès huit ans - délinquant précoce, Chérif Chekatt, tué par la police après deux jours de traque, a multiplié les condamnations et les séjours en prison avant de verser dans la violence djihadiste.

C'est dans le quartier réputé sensible du Neuhof qu'Édouard Philippe et plusieurs membres du gouvernement, dont Christophe Castaner (Intérieur) et Nicole Belloubet (Justice), ont visité une association qui lutte contre la délinquance et la radicalisation. Puis ils ont fait une promenade dans le marché voisin, avant de tenir leur réunion gouvernementale dans un gymnase scolaire.