Le don de gamètes, comment ça marche ?

© MARCEL MOCHET / AFP
  • Copié
En plein débat sur la PMA, l’Agence de la biomédecine lance une campagne nationale de sensibilisation au don de spermatozoïdes et d’ovocytes, dont les stocks sont faibles. 

Chaque année, près de 3.500 nouveaux couples s’inscrivent pour bénéficier d’un don d’ovocyte ou de spermatozoïdes. La plupart sont des couples soufrant d’infertilité, qui attendent une Procréation médical assisté (PMA). Problème ? Selon les derniers chiffres de l’Agence de biomédecine, seuls 540 femmes ont donné des ovocytes en 2015 et 255 hommes ont fait don de spermatozoïdes. Chaque année, il faudrait donc 1.400 donneuses et 300 donneurs supplémentaires pour combler la demande, assure l’Agence. A quelques mois de l’ouverture des débats sur la question de l’ouverture de la PMA aux couples de femmes, l’Agence lance une campagne pour inciter les Français(e)s à donner. Du 2 au 26 novembre, des spots radio, des pubs sur internet et mêmes des films d’animation au cinéma seront déployés pour sensibiliser à la pénurie de gamètes.

Refusant de se prononcer sur l’ouverture de la PMA, l’Agence de biomédecine alerte sur l’espoir de milliers de couples risquant d’être déçus si la pénurie perdure, alors que le délai d’attente s’élève déjà à (minimum) un an. "Ce que nous pouvons dire, c’est qu’aujourd’hui nous manquons de donneurs et qu’il faut diversifier leurs origines. Ne pas pouvoir procréer est une souffrance quotidienne pour les couples concernés. Ils n’invitent plus leurs amis, ne peuvent plus croiser une femme enceinte dans la rue…", avance Françoise Merlet, responsable de l’aide médicale à la procréation à l’Agence de la biomédecine, citée par Le Monde. "Ce n'est pas un don qui revêt un caractère vital comme le don d'organe. Même si les mentalités changent, c'est un don un peu tabou qui touche à l'intime", déplore également Fabrice Guerif, chef du service de médecine et de biologie de la reproduction au CHRU de Tours (Indre-et-Loire), interrogé par Franceinfo.

>> Mais quelles sont les démarches à entreprendre pour donner ? La procédure change selon que l’on soit un homme ou une femme. Explications.

Pour les hommes, une procédure longue mais simple

Pour les hommes, il faut avoir entre 18 et 45 ans, être en bonne santé, et avoir l’accord de sa compagne si l’on est en couple. Le don est gratuit et anonyme, et nécessite une préparation assez riche qui peut durer plusieurs mois : entretien avec un médecin, un psy, bilan génétique, examens sanguins, examens de sperme etc.

Le donneur doit se rapprocher d’un Cecos, un des Centres d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains. Il en existe une petite trentaine en France, et la liste est à retrouver ici. Une fois les examens passés, place au don. "La salle de recueil (des Cecos) est spécifiquement prévue à cet effet et totalement intime", précise le site des Cecos. "Le donneur s’y rend seul ou accompagné de sa compagne s’il le souhaite. Des revues et/ou vidéo sont mises à sa disposition. Il peut également en apporter. Le sperme est obtenu par masturbation. Il sera ensuite congelé. […] Il faut idéalement un délai d'abstinence sexuelle de 3 à 6 jours avant chaque recueil, sinon la qualité du sperme (nombre et mobilité des spermatozoïdes) peut être diminuée", détaille le site.

Après le premier don, le parcours du donneur n’est pas fini. Pour s’assurer de recueillir un sperme de qualité, il est souvent nécessaire d’organiser quatre à cinq recueils par don. Au total, un même donneur peut entreprendre maximum dix fois cette démarche.

Pour les femmes, une procédure plus drastique

Les femmes, elles, peuvent donner leurs ovocytes, la cellule reproductrice destinée à  être fécondée par un spermatozoïde et qui peut faire défaut chez une femme stérile. Egalement gratuit et anonyme, le don d’ovocytes est soumis à des règles encore plus strictes que pour les hommes. La donneuse doit avoir moins de 37 ans (contre 45 ans pour les hommes) et elle doit elle aussi être en bonne santé et avoir l’accord de son compagnon. En plus des examens cités plus haut pour les hommes, les femmes doivent se soumettre à un bilan gynécologique et pré-anesthésie, nécessaire avant toute ponction d’ovaire.

"La ponction des ovaires est ensuite effectuée à l’aide  d’une sonde d’échographie endovaginale qui permet de bien visualiser les follicules. Chaque follicule est ponctionné  et l’ovocyte est aspiré. C’est un geste précis, simple, mais qui cependant nécessite une petite anesthésie (locale, générale, voire l’hypnose). Cette ponction est donc une petite intervention qui nécessite une hospitalisation habituellement d’une journée (les donneuses rentrent le matin à jeun, et ressortent dans l’après-midi)", expliquent les Cecos. Qui préviennent, tout de même :

"Quelques complications, exceptionnelles, peuvent survenir. En dehors de celles liées à l’anesthésie, ce peut être des complications infectieuses (abcès de l’ovaire ou péritonite) qui répondent très bien à l’antibiothérapie, ou hémorragiques (saignement vaginal, hémopéritoine) habituellement sans conséquences. Dans les suites de la ponction, les ovaires restent sensibles pendant environ 48 heures, et il est conseillé le repos à la maison pendant cette période. La donneuse peut reprendre ensuite une vie normale et aura ses règles 14 jours plus tard".

Une donneuse ne peut effectuer que deux dons maximum. Par ailleurs, il est recommandé d’avoir des rapports sexuels protégés avant et après l’opération. En effet, une stimulation hormonale est nécessaire avant le prélèvement d’ovocytes, ce qui peut favoriser la grossesse.

Face à des procédures aussi longues, certains pays, à l’instar des Etats-Unis ou de la Grande Bretagne, ont opté pour la rémunération des dons de gamètes. Mais la France s’est toujours refusée à le faire, par peur des dérives mercantiles. Les Français(e) n’ont donc que l’altruisme comme seule source de motivation.