Le Conseil constitutionnel demande de faciliter la libération des détenus dans des conditions indignes

Le Conseil constitutionnel estime qu'il revient au législateur de garantir aux personnes incarcérées la possibilité de saisir le juge sur leurs conditions de détention.
Le Conseil constitutionnel estime qu'il revient au législateur de garantir aux personnes incarcérées la possibilité de saisir le juge sur leurs conditions de détention. © Dominique FAGET / AFP
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avec AFP , modifié à
Le Conseil constitutionnel demande au législateur de revoir un article du code de procédure pénale qui empêche la remise en liberté des personnes placées en détention provisoire dans des conditions jugées contraires à la dignité humaine. Les sages du Palais Royal exigent qu'une nouvelle loi permettant aux personnes placées en détention provisoire de faire respecter leur droit soit votée d'ici le 1er mars 2021.

Le Conseil constitutionnel a ouvert la voie à la fin de la détention dans des conditions indignes en demandant au législateur de revoir un article du code de procédure pénale qui freinait les remises en liberté de personnes placées en détention provisoire dans des conditions dégradantes. Dans un arrêt rendu vendredi, le Conseil, saisi par la Cour de cassation, a estimé qu'il incombait au législateur "de garantir aux personnes placées en détention provisoire la possibilité de saisir le juge de conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine, afin qu'il y soit mis fin".

Une nouvelle loi permettant aux personnes placées en détention provisoire de faire respecter ce droit à être incarcéré dans des conditions dignes devra être votée d'ici le 1er mars 2021, a exigé le Conseil constitutionnel. Dans sa décision, le Conseil a rappelé que "la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle". "Il appartient aux autorités judiciaires ainsi qu'aux autorités administratives de veiller à ce que la privation de liberté des personnes placées en détention provisoire soit, en toutes circonstances, mise en œuvre dans le respect de la dignité de la personne", a-t-il également souligné.

Mettre fin au surpeuplement des prisons

En janvier dernier, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait condamné la France pour absence de recours effectif et traitements inhumains ou dégradants et recommandé à l'Etat d'"envisager l'adoption de mesures générales visant à supprimer le surpeuplement et à améliorer les conditions matérielles de détention". Certes, a rappelé le collège présidé par Laurent Fabius, un détenu peut actuellement saisir un juge administratif s'il estime que ses conditions de détention sont dégradantes. Mais, a ajouté le Conseil constitutionnel, "les mesures que ce juge est susceptible de prononcer (...) ne garantissent pas, en toutes circonstances, qu'il soit mis fin à la détention indigne".

"C'est une très grande victoire pour l'Observatoire international des prisons (OIP) qui scelle un combat contentieux de près de huit ans pour la reconnaissance du droit à la dignité des détenus", s'est félicité son avocat, Patrice Spinosi, après la décision du Conseil. "Comme nous le lui demandions le Conseil constitutionnel contraint le législateur à la réforme. Le gouvernement n'a maintenant plus de choix. Il doit trouver les moyens pour empêcher qu'un détenu quel qu'il soit et quel qu'ait été son crime puisse être incarcéré en France dans des conditions indignes", a expliqué l'avocat au Conseil d'Etat.