Certaines personnes ont attendu cet appel toute leur vie. Le gouvernement a ouvert mardi une plateforme téléphonique d'écoute pour les victimes d'inceste (0.805.802.804 et 0.800.100.811 pour l’Outre-mer) afin de mieux prendre en compte le phénomène. Et les coups de fil sont déjà nombreux à retentir à l'occasion de de son lancement. Les appels sont anonymes, gratuits, et seuls le département et l'âge sont demandés.
La cellule d'écoute est réservée au recueil de la parole d'adultes victimes d'inceste ou de violences sexuelles dans leur enfance. Ce sont majoritairement des femmes au-dessus de 50 ans qui appellent, et les conversations sont longues. Europe 1 a rencontré ces écoutantes qui prennent le temps pour discuter avec ces personnes.
Les téléphones n'arrêtent pas de sonner
"Ce que vous m'expliquez, c'est qu'enfant, vous avez eu le courage de révéler ces violences et qu'aucun adulte ne vous a protégée concrètement ?" Élodie est l'une des écoutantes de la plateforme gouvernementale. Elle accompagne la libération de la parole de cette femme, au téléphone. Les sonneries n'arrêtent pas de retentir, laissant peu de répit à des écoutantes éprouvées par le récit de ces vies brisées.
Emmanuelle Piet, présidente du collectif féministe contre le viol, accueille cette plateforme téléphonique. "Les écoutantes raccrochent pour redécrocher et il y a beaucoup d'appels non aboutis", explique-t-elle au micro d'Europe 1. "Si cela n'a pas abouti ce matin, la personne peut rappeler dans l'après-midi ou au lendemain et cela finira par aboutir", souligne-t-elle.
Concevoir une "stratégie de protection des enfants"
Cette plateforme permet de partir de la parole des victimes pour mettre la société face à ses responsabilités. Une stratégie défendue par le magistrat Édouard Durand, co-président de la commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants. "C'est dans ce lieu que va émerger de façon très puissante dans la société une stratégie de protection des enfants", affirme-t-il sur Europe 1.
La plateforme d'écoute des victimes d'inceste doit durer deux ans, le temps pour la commission de rendre ses recommandations au gouvernement.