INFO EUROPE 1 - Un policier des stups soupçonné d'avoir fait localiser le téléphone de sa femme

La demande de bornage a été effectuée par un collègue du policier (photo d'illustration).
La demande de bornage a été effectuée par un collègue du policier (photo d'illustration). © AFP
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Pierre de Cossette, édité par Margaux Lannuzel , modifié à
Ce policier est soupçonné d’avoir obtenu le "bornage" de son épouse avec l'aide de l'un de ses collègues, durant une partie de l’été 2018. Le parquet de Nanterre est saisi.
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Regrettable confusion ou dérapage d'un mari jaloux ? Voilà la justice saisie d’une drôle d’affaire, mettant en cause deux enquêteurs de l’un des services les plus prestigieux - mais aussi les plus sulfureux - de la police judiciaire : l’office des stups. Dans le cadre de l'une des nombreuses enquêtes sur les scandale qui secouent l'Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (Octris) depuis 2015, un juge a déniché ce qui pourrait faire penser à l'égarement d'un conjoint un peu trop méfiant. 

Une malencontreuse erreur, selon les policiers

Il y a quelques mois, ce magistrat rennais avait déjà été échaudé par les possibles errements d’un capitaine de police, qui se serait servi d’une de ses enquêtes pour aider l’un de ses "indics", comme l'avait révélé Le Monde. Il a alors exigé des policiers de l’office des stups qu’ils lui rendent les quatre dossiers dont ce capitaine avait été saisi, tout en leur imposant de justifier de chacune de ses "réquisitions" (écoute téléphonique, facture détaillée, géolocalisation…).

Selon les informations d’Europe 1, il est alors apparu qu’en août 2018, dans le cadre d’une enquête sur une importation de cocaïne dans laquelle plusieurs dockers ont été mis en examen, un policier avait demandé le "bornage" (la localisation après coup) du téléphone de... l’épouse d’un de ses collègues de bureau, pour les trois semaines qui venaient de s’écouler. Sommés de s’expliquer, les policiers auraient alors expliqué qu’il s’agissait d’une malencontreuse erreur : le fonctionnaire aurait mal regardé sur le bloc-notes, reportant par mégarde le numéro d’à côté.

Le magistrat n’a semble-t-il pas été convaincu par cet argument, et le parquet de Nanterre a été saisi du dossier. Cette demande de "bornage", facturée 10,20 euros, était-elle bien le fruit d’une méprise ou la rouerie d’un policier inquiet de savoir que son épouse faisait de ses vacances d’été ?

Un nouveau scandale pour les stups ? 

Près de quatre ans après le scandale des sept tonnes de cannabis retrouvées dans le 16ème arrondissement de Paris - qui a conduit à l’éviction et la mise en examen du commissaire François Thierry - cette nouvelle affaire tombe mal. Au ministère de l’intérieur, il est devenu urgent de redorer le blason des "stups", dont l’image a été sérieusement écornée, au point que certains juges refusent désormais de lui confier des enquêtes. Pendant plusieurs mois, le parquet de Paris s’est passé des services de l’Ocrtis, qui petit à petit, essaie de regagner la confiance de la justice – l’un des chantiers du nouveau Directeur Central de la Police judiciaire.

Au plus haut sommet de l’Etat, on estime aujourd’hui nécessaire de réformer l’office des stups. Plusieurs pistes sont actuellement à l’étude, du simple changement de nom à un projet beaucoup plus ambitieux : certains sont allés jusqu’à plaider pour une énorme direction qui mêlerait douanes, police et gendarmerie, dans l’esprit de la DEA (Drugs Enforcement Administration) américaine. L’idée a semble-t-il été écartée aussitôt après avoir été présentée. Certains magistrats, eux, redoutent que tout cela ne finisse en simple ripolinage.