Énergie solaire : pourquoi les Français pourraient (enfin) se laisser séduire

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Élise Racque

L’année 2016 est la pire année jamais enregistrée pour le secteur français. Pourtant, un certain nombre de voyants sont au vert.

La dernière étude publiée cette semaine par l’Observatoire de l’énergie solaire photovoltaïque est sans appel : "2016 se confirme comme la pire année jamais observée en France". Selon le rapport signé par le think tank France territoire solaire qui rassemble les professionnels du secteur, le nombre de raccordements d’installations photovoltaïques au réseau public a drastiquement baissé : -35% par rapport à 2015.

Une bizarrerie française, alors que la production mondiale a augmenté de 9% entre 2015 et 2016. L’électricité photovoltaïque était même devenue la première énergie électrique installée dans le monde. En Italie, l’énergie solaire couvre 8% des besoins en électricité du pays. C’est à peine 2% dans l’hexagone.

  • Pourquoi ça bloque ?

Première explication : les Français rechignent à investir dans des panneaux sur leur toiture. En 2016 our la première fois depuis son apparition dans le pays, le marché résidentiel a produit moins de 20 mégawatts en un an.

Un marché instable. Ces dernières années, les entreprises photovoltaïques avaient de quoi être frileuses. Face à l’emballement du secteur en 2010, le gouvernement avait freiné la dynamique. Pendant trois mois, EDF n’était plus obligée de racheter l’électricité produite par les grosses centrales photovoltaïques. L’industrie solaire avait alors perdu 60% de ses effectifs.

La morosité du secteur s’explique aussi par l’instabilité des réglementations et des aides d’État entre 2013 et 2014. Face à ces fluctuations, les entreprises se méfient : environ 40% des appels d’offres ont été abandonnés.

" Les nouvelles mesures devraient relancer l'intérêt des Français pour le solaire. "
  • Qu’est-ce qui a changé ?  

Un plan pour rassurer les entreprises. L’époque d’un secteur solaire instable semble révolue et les entreprises ont maintenant une plus grande visibilité sur l’avenir. Une programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) publiée fin 2016 donne des assurances aux investisseurs.

Le ministère de l’Environnement promet des appels d’offre réguliers, pour atteindre une puissance solaire totale de 18,2 à 20,2 mégawatts en 2023. C’est 13 mégawatts de plus que la production française actuelle. Une garantie de stabilité qui manquait jusque-là.

Un décret pour encourager l’autoconsommation. La nouvelle rentabilité de l’énergie solaire devrait pousser les particuliers à installer plus de panneaux photovoltaïques pour leur propre consommation. Au lieu de revendre l’énergie produite sur le réseau public d’EDF, ils la garderont pour leur utilisation quotidienne. C’est ce qu’on appelle l’autoconsommation.

Le système existait déjà mais devrait se développer. Un décret paru fin avril autorise depuis peu l’autoconsommation collective. Une bonne nouvelle pour ceux qui habitent en appartement. Les Français peuvent désormais installer des panneaux sur le toit de leur immeuble, et consommer l’énergie produite collectivement.

Contacté par Europe1.fr, Antoine Huard, président de France territoire solaire et directeur de développement de la Générale du Solaire, prédit un bel avenir à l’autoconsommation. "Les particuliers devraient bientôt pouvoir stocker leur propre énergie plus facilement, grâce à la baisse des prix des batteries qui permettent de conserver un temps l’énergie solaire produite", explique-t-il.

  • Quelles conséquences ?

Une énergie de moins en moins chère. Les panneaux photovoltaïques sont arrivés sur le marché français en 2010. Depuis, les coûts d’installation des panneaux ont réduit d’au moins de moitié. Résultat, l’énergie solaire coûte de moins en moins cher : en 2015, la revue National Geographic évoquait une baisse généralisée des prix de 70% en sept ans.

Aujourd’hui, un kilowatt d’électricité produit par des panneaux sur un toit de maison coûte environ dix centimes d’euro. C’est plus de 15 centimes pour un kilowatt acheté à EDF.

La tendance devrait se poursuivre, avec l’augmentation des volumes produits : selon la dernière étude d’Enerplan, le syndicat des professionnels de l’énergie solaire, le prix des systèmes solaires sur toiture devrait diminuer d’encore 25% d’ici à 2025.

Des emplois à la clé.  Les futurs grands projets garantis par les nouveaux appels d’offre du gouvernement sont une bonne nouvelle sur le front de l’emploi. Le rapport du syndicat Enerplan, publié fin février, prédit 10.000 emplois minimum supplémentaires dans le secteur dans six ans.

Le document précise que la majorité de ces emplois seront des postes de maintenance, pour assurer l’entretien des installations. Ils seront donc durables, car difficilement délocalisables.

Avec tous ces facteurs positifs, le marché du solaire français devrait donc reprendre du poil de la bête en 2017. "Notre dernier rapport se veut alarmiste, mais l’année 2016 en France n’est que le reflet des difficultés du passé", nuance Antoine Huart, le président de France territoire solaire. "On peut se réjouir des dernières mesures qui ont été prises. Elles vont relancer l’intérêt des Français pour l’énergie solaire."