Djamila a vécu pendant 20 ans sous l'emprise d'un pervers narcissique : "J'étais sa chose"

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Thibaud Le Meneec , modifié à

Au micro Europe 1 de Wendy Bouchard, mardi, les spécialistes ont tenté d'expliquer le mécanisme derrière la manipulation exercée sur Djamila par son mari, pervers narcissique.

L'ancien mari de Djamila était un pervers narcissique : il la manipulait sans cesse, exploitant ses failles et lui faisant vivre un véritable calvaire pendant 20 ans. Au micro Europe 1 de Wendy Bouchard, mardi, elle raconte son expérience face à ce trouble et la manière dont elle s'est sortie de cette emprise.

"Quand je l'ai connu, il n'était pas comme ça et petit à petit, il a pris possession de moi. 'Je te tiens, tu ne bouges pas, tu ne vois pas telle personne, ne prends pas la voiture parce que tu vas user l'essence et les pneus'. Par contre, pour aller faire les courses et lui acheter son rosé, il n'y avait pas d'histoire d'essence et de pneus. J'étais complètement sa chose.

"T'es nulle, tu le sais bien que t'es nulle !"

Quand il allait prendre sa douche, il m'appelait. Je venais et il me demandait de lui frotter le dos. 'Tu ne peux pas le faire tout seul ?' 'Non, je veux que ça soit toi qui viennes me frotter le dos'. Je passais mes dimanches à jardiner et quand je lui demandais si on pouvait sortir, il me disait que j'avais un grand jardin et que je n'avais pas besoin de sortir.

Il n'a jamais travaillé, donc il fallait que je travaille. Quand je ramenais le salaire, c'est lui qui gérait le compte. Quand j'ai commencé à lui dire qu'il y avait un problème à ce qu'on soit toujours à découvert, il m'a dit : 'Ah… Madame veut s'occuper du compte, maintenant ? Mais qu'est-ce que tu connais aux comptes ? Rien ! T'es nulle, tu le sais bien que t'es nulle !'

 

>> De 9h à 11h, c’est le tour de la question avec Wendy Bouchard. Retrouvez le replay de l’émission ici

Ensemble, heureusement que nous n'avions pas d'enfants. Pour lui, 'il faut tarter' les enfants, comme il dit. Mon fils d'un premier mariage sentait qu'il était faux. Mais mon fils ne disait rien. 'Moi, tant que ma mère ne souffre pas, qu'il ne la touche pas, je ne dis rien'.

Par contre, il m'a frappé une fois, m'a tiré les cheveux et m'a traîné dans la cuisine. J'ai crié, il s'est arrêté et m'a dit : 'Excuse-moi, excuse-moi, j'étais paniqué, je n'aurais pas dû'. Il m'a fait ça en début d'après-midi. En fin d'après-midi, il est allé au supermarché m'acheter un bouquet de fleurs à 3,50 euros et m'a demandé de lui pardonner.

"Écoute, on divorce, tu cherches un avocat"

Quand j'ai vu que ça n'allait plus et que j'étais à bout, je lui ai dit : 'Écoute, on divorce, tu cherches un avocat'. Au début, il n'y croyait pas, il pensait que je disais ça comme ça, comme toutes les autres fois que je lui disais que j'allais partir. Quand j'ai trouvé un avocat, j'ai commencé à faire des cartons et à les ramener chez mes sœurs.

Un jour, je suis revenu (il savait que j'allais revenir) et il m'a dit qu'il m'avait acheté des moules, des crevettes, des beignets, des amandes. 'Je sais que t'aimes ça donc je te les ai préparées'. Je l'ai regardé et je lui ai dit : 'Tu sais, chez moi, quand c'est cassé, c'est cassé, je ne reviens pas là-dessus'. Il est parti blanc, il a claqué la porte et s'est mis devant son ordinateur, comme d'habitude.

Il a appris qu'il avait une leucémie mais ça se soigne. Il a dit à tout le monde qu'il n'en avait plus que pour six mois. [Avant que je parte] il me culpabilisait en me disant que c'était de ma faute s'il était malade."

L'avis de la spécialiste

Marie-France Hirigoyen, psychiatre et auteur de Les Narcisse (éditions La Découverte)

"Ce qui est pervers, c'est de jouer à la limite pour ne pas se faire prendre. Donc la violence physique se repère et on peut aller porter plainte plus facilement. Tout le jeu, c'est d'être suffisamment destructeur sans que ça ne se repère vraiment.

À un moment, il ne faut pas que la victime puisse partir parce que si elle part, il n'y a plus de jeu. Contrairement à d'autres formes de narcissisme, les pervers narcissiques ont une jouissance à détruire l'autre. 'Si j'écrase l'autre, ça me rehausse en même temps'. En revanche, si le jeu pervers cesse, il se pose en victime car c'est une autre manière d'être en victime au premier plan, au centre de l'intérêt de tout le monde."