Aurore culpabilise d’avoir fait le deuil de sa mère : "Je n'ai plus de chagrin"

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Léa Beaudufe-Hamelin
La mère d’Aurore est morte il y a sept ans et demi. Cela fait deux ans qu’Aurore dit éprouver moins de chagrin quand elle évoque sa mère ou quand l’anniversaire de sa mort approche. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Aurore confie à Sabine Marin culpabiliser d’avoir fait le deuil de sa mère.
TÉMOIGNAGE

Aurore a perdu sa mère il y a sept ans et demi. Elle avait alors 16 ans. Aurore dit aller mieux depuis deux ans, éprouvant moins de chagrin quand elle évoque sa mère ou quand l’anniversaire de sa mort approche. Disant culpabiliser d’avoir tourné la page, Aurore s’interroge sur le deuil et ses étapes. Au micro de Sabine Marin, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Aurore évoque la fin de vie difficile de sa mère qui était, selon elle, en dépression.

"Quand a-t-on vraiment fait le deuil après un décès ? J'ai perdu ma maman il y a sept ans et demi. Tous les ans, un peu avant la date fatidique, je n'arrêtais pas de pleurer. Cela fait deux ans que ça va un peu mieux, je ne pleure plus. Je culpabilise d'avoir tourné la page. J’avais 16 ans quand ma mère est décédée. Il y a quelques mois, ma grand-mère en a remis une couche parce qu'elle m'a dit : ‘C’est toi et ton père qui avez tué ma fille’. 

Quand ma grand-mère m’appelle, elle dit : ‘C’est madame Untel’, et pas : ‘C'est mamie’. Elle me prend pour une folle et quelqu'un de toxique, alors que je n'ai jamais rien fait. Pour ma grand-mère, tout allait bien entre elle et sa fille, mais pas pour ma mère. Je n’ai jamais été très proche de ma grand-mère. Pendant un moment, je croyais que c'était moi le problème, mais avec du recul, je me dis que peut être pas. J’essaye de relativiser. 

" Si c’était moi qui étais décédée, j’aurais voulu qu’elle pense à moi calmement "

J'ai accepté le décès de ma mère, mais je ressens de la culpabilité parce que quand j’en parle, je n'ai plus ce sentiment de chagrin. C’est très particulier. Je n’en parle pas de moi-même, mais j’en parle sans trop de difficultés. Si c’était moi qui étais décédée, j’aurais voulu qu’elle pense à moi calmement. Ça paraît évident dans le sens inverse, mais quand c'est l’autre qui part, c’est plus difficile à s’appliquer à soi-même. Je pense qu’il y a autre chose après la mort, j’ai du mal à penser que ça s’arrête là.

Ma mère a vraiment souffert, pas physiquement, mais psychologiquement. Ça a été très compliqué pour elle, notamment à cause de ma grand-mère et mon père qui sont très spéciaux. Elle a fait un AVC, mais je pense qu'elle était en dépression. Elle s’est mise à boire, ce qui ne lui ressemblait absolument pas. Elle ne mangeait plus, elle ne dormait plus ou très peu, elle se déshydratait et elle pleurait beaucoup. Ça me faisait penser à une dépression. 

Ça s'est fait en deux phases. Il y a une phase où elle était épuisée. Elle est tombée, mais sans faire de malaise. La deuxième fois, ça a été fatal. Ce qui m’a traumatisée, c’est que je l’ai vue tomber. Je l’ai vue mourir sous mes yeux. J’ai vu qu’elle commençait à tomber, alors j'ai essayé de la relever comme je pouvais, mais elle était trop lourde pour moi. J’ai donc assisté à toute la scène. 

Ce qui m'a aussi marquée, c’est que ses derniers mots, c’était : 'J’en peux plus'. Mon père ne l'a pas compris. Ma grand-mère n’était absolument pas là pour moi. J'ai vécu une période de dépression. Le problème, c'est que j’étais mineure et mon père ne voulait pas me payer une psychothérapie. J'ai dû le faire toute seule. J'ai fait quelques séances de psychothérapie, mais je n’avais pas assez de ressources pour me payer une séance toute les semaines."