Attentats du Stade de France le 13-Novembre : le nécessaire devoir de mémoire des victimes

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Marion Dubreuil , modifié à
Manuel Dias, chauffeur de bus, est la première victime des attentats du 13-Novembre, au Stade de France. Sa fille Sophie Dias va témoigner mardi devant la cour d’assises spéciale. En juillet dernier, elle s’était confiée au micro d’Europe 1 pour raconter avec Gwendoline et Sarah, deux survivantes, son combat pour la mémoire de son père et des autres victimes.
TÉMOIGNAGE

"Souvent, on me dit 'vous avez perdu votre papa au Stade de France ? Ah mais je croyais qu’il n’y avait pas de victime'", regrette Sophie Dias. "C’est difficile de devoir se justifier en rappelant les faits, alors que ça a bouleversé notre vie à jamais." Mardi après-midi, elle va témoigner au procès des attentats du 13-Novembre pour parler de son père, Manuel, et de son deuil impossible. Gwendoline Lopez Moreira, 29 ans, et Sarah Zeitouna, 28 ans, qui se sont confiées à Europe 1 en juillet, seront dans la salle pour la soutenir. 

Ce 13 novembre 2015, les deux jeunes femmes travaillaient comme extras dans les restaurants aux abords du stade. Quand la première explosion a retenti, elles devaient se retrouver pour une pause. Sarah a été happée par le blast. "J’étais juste à côté du kamikaze avec le papa de Sophie", Manuel Dias. Le chauffeur de 63 ans est décédé dans l’explosion. "C’était très important pour ma famille et moi de rencontrer Sarah et Gwendoline", confie Sophie, "de pouvoir comprendre sur place ce qui s’était passé à quel endroit exactement."

"Notre vie a basculé"

Cette nuit a été interminable pour Sophie. "Jusqu’au bout, j’ai cru qu’il était blessé, quelque part, sans avoir vu d’ambulance sans personne pour le secourir." À midi, le lendemain, elle reçoit un appel du consulat du Portugal. "La dame, très bouleversée, m’explique qu’elle a une très mauvaise nouvelle à m’annoncer. Sa voix s’éraille, et elle me dit que mon papa est décédé."

Sarah, elle, porte encore une cicatrice au front. "Je n’ai pas toujours envie de dire pourquoi. Mais j’ai aussi 18 impacts sur le corps", dit-elle. Quant à Gwendoline, elle n’a pas été blessée physiquement mais elle n’a pas parlé pendant trois semaines après les attentats. "Notre vie a basculé", rappelle-t-elle.

"Personne ne méritait ça"

"Personne ne méritait ça enfin, on est sans armes on n’a rien pour se défendre. Je suis musulmane", explique Sarah, "et ça m’est arrivé, ça n’a rien à voir avec l'islam." "Pourquoi nous ?", s’interroge Gwendoline à voix haute, "même pas pourquoi la France, mais pourquoi faire ça ? Il n’y a pas de raisons. S’il y a des désaccords, il faut les régler sans s’en prendre aux innocents."

Depuis six ans, les trois jeunes femmes se retrouvent chaque année pour commémorer les attentats au pied du stade de France devant la plaque "à la mémoire de Manuel Dias et en respect aux nombreux blessés et victimes du terrorisme sur ce lieu le soir du 13 novembre 2015". "C’est mon combat de rappeler ce qui s’est passé", explique Sophie. "Avec Gwendoline et Sarah, on ne veut vraiment pas qu’on oublie ce site." Sarah ajoute : "On veut juste qu’on se rappelle de nous."