Un physicien accusé de terrorisme

Le frère et l'avocat d'Adlène Hicheur, un physicien soupçonné d'être en lien avec Al-Qaïda, redoutent les amalgames.
Le frère et l'avocat d'Adlène Hicheur, un physicien soupçonné d'être en lien avec Al-Qaïda, redoutent les amalgames. © MAXPPP
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avec Fabienne Le Moal et AFP , modifié à
Les enquêteurs avaient retrouvé des documents sur Al-Qaïda chez lui. Son procès s'ouvre jeudi.

Le tribunal correctionnel de Paris juge à partir de jeudi un physicien franco-algérien du Cern soupçonné d'avoir envisagé des attentats contre la France. Un procès qui prend une dimension particulière après les tueries de Toulouse et Montauban par Mohamed Merah.

Des documents sur Al-Qaïda à son domicile

En octobre 2009, Adlène Hicheur, un Franco-Algérien de 35 ans, docteur en physique des particules détaché au Centre européen de recherche nucléaire (Cern) de Genève, est interpellé à Vienne dans l'Isère au domicile de ses parents et mis en examen pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". A son domicile d'Ornex dans l'Ain, les enquêteurs découvrent une abondante documentation relative à Al-Qaïda et au jihad.

Les soupçons des enquêteurs de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) sont nés de la surveillance de plusieurs comptes de courriers électroniques après l'envoi sur le site de l'Elysée début 2008 d'un message reprenant un communiqué d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Les policiers ont suivi les échanges entre des adresses électroniques, qui s'avèrent être celles du chercheur du Cern et de Mustapha Debchi, présenté par l'accusation comme un responsable d'Aqmi qui vivrait clandestinement en Algérie.

Des mails troublants

Dans l'un de ces mails, qui a particulièrement alerté les enquêteurs, Adlène Hicheur parle d'un escadron de chasseurs alpins, basé près d'Annecy et qui a servi en Afghanistan, comme possible cible. Pour les juges d'instruction chargés de l'enquête, les échanges électroniques ont "franchi le simple débat d'idées politiques ou religieux pour s'établir dans la sphère de la violence terroriste". A leurs yeux, Adlène Hicheur "à bien des égards apparaissait comme, si ce n'est un décideur, à tout le moins comme un militant donnant des idées, renchérissant sur des projets".

Selon l'accusation, le prévenu a donné "en connaissance de cause, son accord à Mustapha Debchi en vue de constituer une cellule opérationnelle prête à commettre des actions terroristes en Europe et en France". Depuis son incarcération il y a deux ans et demi, Adlène Hicheur affirme de son côté n'avoir jamais été d'accord pour envisager "des trucs concrets". Il n'y a "pas la moindre preuve d'un début d'intention" terroriste, confirme son avocat, Me Patrick Baudouin.

La famille d'Adlène Hicheur redoute les amalgames

Avec le drame récent de Toulouse, le frère d'Adlène Hicheur redoute les amalgames. "Il cumule les handicaps : physicien, il travaille dans le nucléaire, il est musulman d'origine algérienne. C'est un cocktail explosif !", déclare-t-il sur Europe 1. "La DCRI a présenté Adlène comme 'le physicien d'Al-Qaïda'. Mais il n'a jamais voyagé dans des pays problématiques", ajoute Halim Hicheur.

"Adlène cumule les handicaps" :

"On l'a présenté dès le départ comme le coupable idéal", dénonce Me Baudouin. "La justice lorsqu'elle s'emballe a du mal à reconnaître ses erreurs", estime-t-il. Adlène Hicheur encourt dix ans de prison.