Taubira : que risque vraiment Minute ?

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avec Pierre de Cossette , modifié à
DÉCRYPTAGE - Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour injure publique à caractère racial sur la Une de l'hebdo d'extrême-droite.

L'INFO. "Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane". Avec cette Une, l'hebdomadaire d'extrême droite Minute s'est offert mardi un bon coup de pub en surfant sur les insultes racistes qui ont récemment visé la garde des Sceaux. Résultat : un tollé général à droite comme à gauche et la décision, mardi soir, de Jean-Marc Ayrault d'en référer à la justice. Manuel Valls lui emboitait le pas en annonçant pour sa part que le gouvernement étudierait rapidement les moyens d'"agir contre la diffusion" du titre. Mercredi matin, alors que le numéro controversé de l'hebdomadaire était bien en vente dans les kiosques, le parquet de Paris annonçait l'ouverture d'une enquête préliminaire pour injure publique à caractère racial. L'hebdomadaire s'estime quant à lui couvert sur le plan judiciaire. En cas de poursuites, que risque désormais le journal ?

L'injure publique à caractère racial. "Les attaques racistes sont insupportables et scandaleuses. Je les condamne avec la dernière énergie et je suis plus que jamais aux côtés de Christiane Taubira", avait dénoncé mardi le Premier ministre. Ce dernier a par la suite indiqué par voie de communiqué qu'il  souhaitait que le procureur de la République de Paris se saisisse de l'affaire  afin "de porter ces faits susceptibles de constituer l'infraction d'injure publique à caractère racial" en justice. Le parquet a donc répondu en ouvrant une enquête préliminaire précisément sur ces faits.

>> La peine encourue : sur ce point précis, l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoit une peine de 6 mois de prison et de 22.500 euros d'amende. Le tribunal pourra également décider de l'affichage ou de la diffusion de cette condamnation.

12.11 Ayrault Valls et Taubira 930620

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Et maintenant ?  La police judiciaire parisienne a été saisie de l'enquête. Des investigations, dans ce type d'affaire  de presse qui restent assez sommaires : on entend rapidement le responsable de la publication et l'auteur de l'article simplement pour avoir confirmation qu'ils sont bien à l'origine des phrases de la parution. C'est ensuite à l'audience, devant les juges, à la 17e chambre correctionnelle, que tout se joue. C'est là que les mots écrits dans Minute, à la Une ou dans le corps de l’article seront examinés. "Ce n'est pas aux vieux singe que l'on apprend à faire la grimace", peut-on y lire page 4. Tout l'enjeu des débats sera déterminer s'il s'agit d'une publication humoristique ou non.

13/11/2013 Minute Taubira DR 930x620

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Minute assume et s'estime "difficilement condamnable". "L’objectif, c’était de faire parler de nous", raconte mercredi un journaliste de Minute sur le site des Inrockuptibles. "On voulait se payer un coup de pub pour zéro euro, le contrat est rempli au-delà de nos espérances", glose-t-il. Un "coup" totalement improvisé, selon lui. "Durant le week-end, nous n’avions pas vraiment d’idées de couverture. On pensait faire notre une sur la guerre de 14-18 et puis finalement, l’un d’entre nous a proposé cette blague de comptoir sur Taubira. Ça a fait marrer tout le monde, on a alors décidé de la faire", poursuit le journaliste. L'hebdo assume donc cette couverture controversée et s'estime même à l'abri des poursuites."C’est une couverture composée d’éléments de langage courant", se défend un autre collaborateur de la publication d'extrême-droite. "On se doutait que SOS Racisme porterait plainte, mais nous avons prévu le coup du point de vue judiciaire. Nous sommes difficilement condamnables", argue-t-il. Affaire à suivre, donc.

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