Taubira accusée de vouloir limoger le procureur général

© MAXPPP
  • Copié
avec Alain Acco et Reuters , modifié à
PASSE D'ARMES - La chancellerie, qui a démenti mardi soir cette information du Canard Enchaîné, dénonce une exploitation politique de l'affaire.

PRESSIONS. L'Union syndicale des magistrats (USM) a dénoncé mardi les prétendues pressions exercées par la ministre de la Justice Christiane Taubira pour obtenir la démission du procureur général de Paris. Selon une information du Canard enchaîné à paraître mercredi, dont Europe 1 a eu confirmation, les directeurs du cabinet de la garde des Sceaux ont convoqué récemment François Falletti pour lui demander de démissionner de lui-même. Chose que le magistrat a refusé de faire.

La chancellerie dément. La Chancellerie a démenti mardi soir qu'il y ait eu une volonté de limoger le magistrat, précisant qu'un poste vacant lui avait été
proposé pour gérer sa fin de carrière.  Un poste que François Falletti avait refusé, toujours selon la Chancellerie, qui assure que l'affaire en restera là. "Il est rentré procureur général dans le bureau, il en est ressorti procureur général et il le restera", a-t-on indiqué, dénonçant l'exploitation politique de l'affaire. "Il n'y a pas eu d'instruction de la garde des Sceaux", a-t-on encore ajouté.

13.11 Christiane Taubira 930620

© MAX PPP

"De mauvaises manières", pour le magistrat. François Falletti a toutefois écrit à Christiane Taubira une lettre pour "dénoncer des mauvaises manières" et en a fait parvenir une copie aux deux responsables du Conseil supérieur de la magistrature (CSM).  Le procureur général avait été nommé en janvier 2010 sous la présidence de Nicolas Sarkozy. "La Chancellerie voudrait le remplacer par quelqu'un qui aurait une sensibilité plus proche de la ministre", ajoute-t-on de source judiciaire. Le magistrat se serait vu proposer en compensation le poste de premier avocat général à la cour de cassation, un avancement sur le plan hiérarchique, mais honorifique. François Falletti qui avait été nommé en 2010 pour sept ans, comptait cependant prendre sa retraite dans un an et demi, précise-t-on de même source.

Justice, statut 930x620

L'USM dénonce "des pratiques scandaleuses". "Ce sont des pratiques scandaleuses qu'on a connues sous la précédente majorité", s'est indigné Christophe Régnard, président de l'USM, au micro d'Europe 1. "Le prédécesseur de François Falleti avait été viré dans les mêmes circonstances par la majorité Sarkozy parce qu'il était probablement trop", a-t-il ajouté. "La logique voudrait que madame Taubira renonce à ce projet fou", a poursuivi le syndicaliste déplorant que la garde des Sceaux qui insiste depuis 18 mois sur l'indépendance des procureurs ne s'attache pas "à mettre ses actes en corrélation avec ses paroles".

30.09 Des magistrats en robe rouge. 930620

© Max PPP

Un limogeage est-il possible ? Le fait est que Christiane Taubira n'a pas le pouvoir de limoger le procureur général. La seule solution qui s'offre à la Garde des sceaux, si sa volonté est avérée, est d'entamer une procédure disciplinaire dite de "déplacement dans l'intérêt du service", a relevé Christophe Régnard. "Mais il va falloir trouver des choses à reprocher à François Falleti", note-t-il, avant d'ajouter : "si on lui a fait des pressions pour qu'il parte, c'est probablement que Christiane Taubira n'a strictement rien à lui reprocher particulièrement, si ce n'est peut-être de ne pas être assez proche d'elle".  

Des craintes liées au nouveau parquet financier ? Cette polémique intervient au moment où le gouvernement vient d'installer un nouveau parquet financier pour tirer les leçons de l'affaire Cahuzac. Ce serait une des possibles explications du comportement prêté à la ministre de la Justice, qui pourrait redouter, note le Canard Enchainé, "la façon dont le procureur général tranchera les conflits de compétence" entre la procureure financière et ses homologues de la cour d'appel.

sur le même sujet, sujet,

VIDEO - Courroye : Taubira se range à l'avis du CSM, pas de sanction

INFO - Une femme à la tête du Parquet financier

ZOOM - Fraude fiscale : l'Etat muscle sa lutte