Plongée dans le futur bunker des écoutes téléphoniques

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avec AFP et Guillaume Biet
REPORTAGE - Installée dix mètres sous terre, une plateforme d'écoutes téléphoniques doit ouvrir en avril prochain, à Elancourt, dans les Yvelines.

La France s'apprête à mettre en service une structure unique en Europe. Une plateforme où seront centralisées toutes les écoutes, y compris les surveillances Internet. Installée dix mètres sous terre, dans un coffre-fort de béton sur un site de Thales, une plateforme d'écoutes téléphoniques doit ouvrir en avril prochain, à Elancourt, dans les Yvelines.

>> Europe 1 a pu visiter en avant première cet immense serveur informatique auquel pourront se connecter les enquêteurs et les magistrats. Ces derniers ne pouvaient le faire auparavant de manière autonome.

Un bloc de béton à dix mètres sous terre. Cette plateforme, véritable rêve pour un policier, pourrait toutefois inquiéter les citoyens, après le scandale des écoutes de la NSA américaine. Pour les rassurer, la Chancellerie nous a ouvert les portes du nouveau site classé "confidentiel défense". Sur place : un bunker de béton sur trois niveaux, sous dix mètres de terre, mais construit 130 mètres au-dessus du niveau de la Seine pour éviter les inondations.

Une dématérialisation totale des écoutes. Finis papiers, copies sur CD-Rom, envois postaux, tout ou presque ici est dématérialisé. Le cœur de la machine tient dans un bâtiment ultra-sécurisé de 70m² où deux rangées de serveurs informatiques sont refroidies en permanence. Toutes les écoutes téléphoniques et Internet sont stockées sur ces vingtaines de baies informatiques, reliées par câbles aux opérateurs téléphoniques et Internet français - Free, Bouygues, Orange, Numéricable, etc. Et rien n'y échappe : conversations, SMS, fax, courriel, pages web, messageries instantanées.

Un processus beaucoup plus rapide. Grâce à cette plateforme centralisée, les enquêteurs pourront accéder beaucoup plus rapidement aux informations. Pour savoir à qui appartient un numéro suspect, il ne faudra par exemple que 5 minutes, contre 12 heures actuellement. Et surtout, les juges eux aussi pourront accéder en temps réel aux écoutes et aux factures détaillées.

Des écoutes possibles en direct. "En me connectant à mon ordinateur portable avec une carte à puce sécurisée, je peux accéder à l'ensemble des dossiers dont je suis chargé, y compris, prendre connaissance, en direct, des communications qui sont interceptées. C'est parfaitement nouveau dans le travail des magistrats et  des utilisateurs", estime le magistrat directeur du programme, Richard Dubant.

40 millions d'économies sur les frais de justice. Avec cette plateforme centralisée, le ministère de la Justice assure que les écoutes et les surveillances de communications seront beaucoup plus sécurisées qu'aujourd'hui. Et un comité de contrôle surveillera qu'il n'y a aucune dérive. Cette nouvelle plateforme devrait également permettre de faire d'importantes économies sur les frais de justice : près de 40 millions d'euros par an, alors que le nombre d'écoutes et d'interceptions ne cesse d'augmenter chaque année. En 2012, 35.000 écoutes judiciaires ont été réalisées, contre 20.000 en 2006.