PIP : l'étrange composition des implants

Selon l'avocat de PIP, les prothèses contenaient des produits alimentaires et non pas industriels.
Selon l'avocat de PIP, les prothèses contenaient des produits alimentaires et non pas industriels. © REUTERS
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avec agences , modifié à
Les prothèses contiendraient un mélange de composants industriels jamais testés cliniquement.

Un additif pour carburant serait présent dans certains implants PIP. Europe1.fr fait le point sur ce dernier développement dans le scandale sanitaire des prothèses mammaires.

>> De nouveaux éléments

Du "baysilone" en cause. Le "baysilone", additif pour carburants, était présent dans le gel des prothèses mammaires défectueuses de l'entreprise PIP, d'après les révélations de RTL qui s'est procuré la composition des implants mammaires frauduleux. Les prothèses contiendraient un mélange de produits commandés à de grands groupes de chimie industrielle jamais testés cliniquement quant à leur éventuelle nocivité sur l'organisme. Parmi les autres additifs incriminés :  le "silopren" et le "rhodorsil", utilisés également dans l'industrie du caoutchouc. Selon le chercheur en chimie et toxicologie, interrogé par RTL, ce sont bien ces produits non-purifiés qui rongeaient l'enveloppe des prothèses mammaires. Ils seraient donc bien à l'origine de la rupture des implants.

Du bon gel stocké pour les contrôles. Pour contourner les contrôles sanitaires, l'entreprise avait monté son stratagème. "D'après ce que nous a dit un employé, le gel pour lequel PIP avait reçu une autorisation était stocké dans des cuves pour les contrôles, tandis qu'un autre, moins cher, lui était substitué dans la fabrication", avait expliqué un avocat en juin 2010.

Me Yves Haddad a démenti les informations citées précédemment.  "Ce n'est pas vrai du tout. C'est un produit qui existe depuis 1980 et qui était acheté à (l'entreprise pharmaceutique) Rhône-Poulenc. Il ne s'agit pas d'un produit industriel, mais d'un produit alimentaire du même type que ceux qui entrent par exemple dans la composition des rouges à lèvres", a-t-il expliqué.

>> De nouveaux témoignages

Les confidences d'une entreprise allemande. L'entreprise chimique allemande Brenntag a dit lundi avoir fourni du silicone industriel à la société française PIP, au centre d'un scandale mondial de prothèses mammaires défectueuses. "Nous avons fourni le produit et les caractéristiques du produit à PIP et nous sommes en contact avec les autorités sanitaires françaises", a déclaré le porte-parole de l'entreprise, Hubertus Spethmann. Le "baysilone" a été fourni à PIP par la filiale française de Brenntag, a-t-il indiqué. Il n'a pas donné davantage de précisions mais le témoignage des responsables de cette entreprise allemande devrait grandement intéresser les enquêteurs.

Des analyses à l'étranger, notamment outre-Manche, sont aussi nécessaires selon Philippe Courtois. Le ministre de la Santé britannique a réclamé le contrôle de ces implants sur 40.000 femmes, au moment où le Sunday Telegraph révèle que les autorités médicales de ce pays connaissaient les dangers il y a 11 ans.

Des mails internes à PIP qui en disent long. "Le chiffre d'affaires est plus important que la constitution des enveloppes", répondait une responsable du marketing du groupe PIP à des commerciaux qui s’inquiétaient de la qualité de protection des PIP. "Encore une ! Nouvelle rupture d'enveloppe gel implantée en 2003 (...) Toujours pas d'explications ?", "Si un problème d'enveloppe éclatait, je vous laisse deviner la suite", rapportaient des commerciaux en 2005 et 2006.

L'Afssaps savait quelque chose. "D'après l'Afssaps, on savait qu'il s'agissait d'un gel impropre, plutôt utilisé dans l'alimentaire et l'informatique", a déclaré le médecin-conseil d'une association de porteuses d'implants PIP, Dominique-Michel Courtois. A l'époque, les analyses de l'Afssaps avaient mis en évidence un gel non conforme, au pouvoir irritant mais non géno-toxique (sans altération de l'ADN des cellules), avec un risque élevé de rupture des enveloppes et de suintement du gel.

>> Ce qu'en disent les victimes

Les victimes exigent plus. "On ne pouvait pas penser que le gel ait pu contenir un additif pour carburant. C'est pourquoi on réclame des analyses de prothèses directement prélevées sur les patientes", a ajouté l'un des avocats des plaignantes, Philippe Courtois. Selon lui, les analyses de l'Afssaps n'ont porté que sur des prothèses saisies lors d'une perquisition au sein de l'entreprise PIP en mars 2010.

Déjà 2.400 plaintes enregistrées. Le cap des 2.400 plaintes de porteuses d'implants mammaires de la société Poly Implant Prothèse (PIP) a été franchi dans l'enquête préliminaire pour des faits de "tromperie aggravée" dont devront répondre les principaux cadres de la société. Ouverte au mois de mars 2010, l'enquête a été close le 10 octobre dernier et le procès devant le tribunal correctionnel de Marseille devrait s'ouvrir au mois d'octobre 2012.

Quant au fondateur du groupe PIP, il sortira de son silence cette semaine selon son avocat, Me Yves Haddad. Depuis le début de l'affaire, Jean-Claude Mas est resté muet. Il fait par ailleurs l'objet d'un mandat d'arrêt international d'Interpol.