Nucléaire : EDF épinglé à Flamanville

L'ASN a demandé "plus de rigueur" sur le chantier de l'EPR de Flamanville.
L'ASN a demandé "plus de rigueur" sur le chantier de l'EPR de Flamanville.
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avec Baptiste Cordier et AFP , modifié à
L'ASN a relevé de nombreuses contrefaçons sur le chantier du nouvel EPR.

Ces derniers mois, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a relevé des malfaçons dans le gros œuvre du futur réacteur EPR de Flamanville. Certaines de ces malfaçons seraient même de nature "à porter préjudice à la qualité finale des structures", selon Le Canard enchaîné publié mercredi.

Le gendarme nucléaire a envoyé "entre octobre 2010 et août 2011, quatre lettres au vitriol qui mettent en cause la qualité de plusieurs constructions vitales pour la sécurité du futur réacteur EPR", dont la construction est assurée par Bouygues.

Les inspecteurs de l'ASN ont relevé des trous dans des piliers en béton ou des défauts dans les parois de piscines destinées à recevoir le combustible nucléaire irradié, affirme l'hebdomadaire.

"Les trous dans le béton, les nids de cailloux (zone manquant de ciment) au sens large, c'est une problématique courante du génie civil. EDF, en tant qu'exploitant, se doit de les identifier et de les réparer", souligne Simon Huffeteau, chef de la division de Caen à l'ASN. "Les réparations sont évidemment obligatoires", a-t-il ajouté.

"On a demandé à EDF pour les prochains bétonnages complexes que soient pris plein de dispositions pour que cela ne se reproduise pas", a encore dit Simon Huffeteau.

"Faire des efforts importants"

"Les travaux béton visés par les lettres de l'ASN citées dans cet article sont encore en cours et n'ont même pas été réceptionnés par EDF", a précisé le ministère chargé de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie numérique. Les observations de l'ASN seront bien entendu prises en compte dans le cadre de ce chantier en cours", a-t-il réagi dans un bref communiqué. De son côté, EDF n'a pas souhaité faire de commentaire.

La semaine dernière, l'ASN avait indiqué avoir constaté des "écarts" et "faiblesses" lors d'une inspection du site de construction du réacteur EPR et demandé à EDF de "faire des efforts importants pour démontrer la qualité de la construction".

"Une menace permanente sur EDF"

"En terme de sûreté, c'est un véritable problème", dénonce Yannick Rousselet, de Greenpeace. "Ce qui est vraiment scandaleux, quand on regarde les lettres de l'ASN à EDF de cet été, de l'année dernière ou d'il y a trois ans, on voit qu'il y a une menace permanente sur EDF mais que rien ne change. On trouve les même demandes, les mêmes qualificatifs", se désole-t-il au micro d'Europe 1.

La mise en service de l'EPR de Flamanville (Manche), le premier réacteur nucléaire de troisième génération, n'est plus attendue que pour 2016, avec deux ans de retard sur la date initiale, avait annoncé EDF fin juillet.

Bouygues : "une manipulation honteuse et scandaleuse"

Martin Bouygues, le PDG du groupe éponyme, constructeur de l'EPR, a estimé que les critiques sur la qualité du gros oeuvre étaient "une manipulation honteuse et scandaleuse". "C'est vrai qu'il y a des malfaçons, car c'est un prototype et il y a des difficultés techniques, mais elles sont reprises", a-t-il expliqué lors de la présentation des résultats du premier semestre.

"Les photos montrant des trous ont été prises avant que les travaux de reprise soient effectués. Cela n'a aucun sens", a assuré Martin Bouygues. "Nos relations avec EDF (le client, ndlr) sont excellentes et la satisfaction d'EDF est tout à fait correcte", a-t-il assuré.