Mayotte agitée par un conflit sur la vie chère

La hausse des prix provoque la colère des habitants de Mayotte
La hausse des prix provoque la colère des habitants de Mayotte © CAPTURE D'ECRAN BFMTV
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Jean-Louis Dell'oro , modifié à
Depuis un mois, un bras de fer s'est engagé contre la cherté des prix entre syndicats, patrons et représentants de l'Etat.

Cela fait près de 30 jours que la grogne sociale s'est installée dans le 101ème département français. Les manifestations contre l'inflation des prix et les grèves se sont multipliées, rappelant par certains aspects le mouvement conduit par Elie Domota en Guadeloupe en 2009. Les négociations semblent aujourd'hui dans l'impasse.

La mort mercredi en marge d'une manifestation d'un homme de 39 ans, Ali El Anziz, a alimenté les tensions déjà présentes entre les forces de l'ordre et la population. Le soir, quelques échauffourées ont eu lieu dans son village d'origine. Jeudi, une marche blanche a rassemblé dans le silence et le recueillement 5.000 personnes à Mamoudzou, la préfecture de la ville. Europe1.fr fait le point sur la situation.

Une inflation galopante

Les habitants de cette île de l'Océan indien réclament une baisse des prix pratiqués par la grande distribution.

"Entre 2007 et 2011, il y a eu une inflation de plus de 50% à Mayotte. Les frais de douanes et le transport n'expliquent pas une telle hausse", dénonce Salim Nahouda, le secrétaire général CGT Ma, l'une des organisations à l'origine de l'intersyndicale. Un constat qui semble faire consensus. "Tout le monde s'accorde sur un point : les prix ont augmenté plus rapidement et plus fortement à Mayotte que partout ailleurs en métropole et en Outre-mer", confirme Abdoulatifou Aly, député de Mayotte.

Une baisse des tarifs en négociation

L'intersyndicale réclame désormais la nomination d'un médiateur et exige 30% de réduction sur 11 produits de première nécessité, notamment sur le poulet. Mais les négociations avec la grande distribution bloquent depuis des jours sur un certain nombre de ces produits.

Salim Nahouda dénonce les monopoles, les marges exorbitantes et la proximité entre les représentants de l'Etat et les chefs d'entreprise. Ce qui "a faussé dès le départ la démarche de négociation", affirme-t-il. Avant d'enfoncer le clou : "les profiteurs n'ont pas leur place à Mayotte".

Abdoulatifou Aly reconnaît le problème des monopoles mais il condamne la tournure prise parfois par les événements. "La violence ne bénéficie pas à ceux qui se battent contre la vie chère. Cela va aggraver la situation d'oligopoles en décourageant les investisseurs potentiels", prévient-il.

Une économie locale atrophiée

Les négociations tournent autour d'un renforcement du contrôle des prix par l'Etat via la DGCCRF et l'observatoire des prix ainsi qu'une baisse négociée des tarifs pendant trois mois. Mais il s'agit de mesures de court terme. "La vraie solution, c'est la libre concurrence", souligne Abdoulatifou Aly. Le développement de l'économie locale, aujourd'hui quasiment exclusivement tournée vers les importations, avec des subventions et des exonérations de charges patronales est aussi dans les esprits.

Les syndicats appellent l'Etat à prendre ses responsabilités. La venue de la ministre de l'Outre-mer Marie-Luce Penchard il y a une semaine et ses promesses n'auront donc pas suffit. La population attend désormais plus de volontarisme de la part des autorités afin de dégripper la situation. Une situation qui devient de plus en plus compliquée au fil des jours, alors que la plupart des magasins sont fermés et que, depuis une semaine, les ouvertures et les fermetures de supermarchés se succèdent.

Vendredi, l'Assemblée des départements de France (ADF) a demandé à l'Etat de prendre "en urgence" toutes les mesures nécessaires.