Lycéens en jupe à Nantes : retour sur une polémique

Les lycéens nantais ne seront pas obligés de porter des jupes vendredi.
Les lycéens nantais ne seront pas obligés de porter des jupes vendredi. © Max PPP
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Damien Brunon , modifié à
MISE AU POINT - La polémique alimentée par les réseaux opposés au mariage pour tous et à la “théorie du genre” s’avère largement erronée.

L’INFO. A en croire certains sur les réseaux sociaux mercredi, le gouvernement serait en train de mettre à mal les différences entre garçons et filles dans les lycées de Loire-Atlantique. Tout commence mercredi en fin de matinée alors que le Figaro publie sur son site un article intitulé : “L’académie de Nantes demande aux garçons de se mettre en jupe vendredi pour lutter contre les discriminations”. Il n’en fallait pas plus pour agiter les réseaux anti-mariage gay, désormais fixés sur la lutte contre la “théorie du genre” qui voudrait imposer, selon les personnes qui la pensent réelle, une indifférenciation entre les sexes.

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Les réseaux sociaux s’en emparent. Olivier Vial, président de l’UNI, un mouvement étudiant marqué à droite et porte-parle de “L’observatoire de la théorie du genre” tweetait dès mercredi matin : “l’académie de Nantes incite les garçons à porter une jupe et du rouge à lèvre vendredi 16 mai. #ConchitaWurstStyle”, référence au travesti barbu qui a remporté l’Eurovision.

“Je n’ose y croire tellement c’est grave. C’est scandaleux. C’est pourquoi Benoît Hamon, le ministre de l’Education nationale, doit intervenir sans délai pour condamner fermement cette initiative et l’annuler”, a déclaré dans une communiqué Ludovine de la Rochère, la porte parole de la Manif pour tous.

De manière générale, l’information a été relayée sur la plupart des blogs liés à la sphère des opposants à la “théorie du genre”, comme le Salon Beige. Sur le site du Figaro, l’article relayant l’information est partagé plus de 15.000 fois sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, les messages comportant les mots “Nantes” et “jupes” connaissent une progression phénoménale depuis le début de la journée.

Qu’en est-il réellement ? Pourtant, le fond de l’information est erroné pour plusieurs raisons. Tout d’abord, malgré le titre initial du Figaro qui laissait penser qu'il était “demandé” aux lycéens de venir en jupe, ces derniers sont en réalité “invités” à le faire. Ils ont aussi la possibilité de simplement arborer un autocollant “je lutte contre le sexisme, et vous ?”. Le quotidien s’est d’ailleurs aperçu de son erreur dans la journée puisqu’il a changé le titre de son article dans ce sens.

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Ensuite, ce ne sont pas tous les lycées de Loire-Atlantique qui sont concernés par le projet, mais seulement 27 sur les 220 que compte le département. Surtout, ce n’est pas directement le rectorat qui a invité les lycéens à porter des jupes. L’administration locale a simplement relayé l’information autour de cette journée spéciale organisée par le Conseil académique de la vie lycéenne (CAVL), une assemblée de lycéens, de parents d’élèves et d’enseignants. Du côté du rectorat de Nantes, on explique que "se mettre en jupe n'est pas le propos de cette action. L'académie de Nantes ne demande pas aux garçons de venir en jupe", a insisté son porte-parole.

L'opération consiste "principalement en un temps d'échange sur les discriminations sexistes et les moyens éventuels d'y remédier dans la vie du lycée", a précisé le porte-parole du rectorat. "Il s'agit d'aborder les questions de respect et d'égalité des chances". "Pour la première édition en avril 2013, ce sont surtout des filles qui sont venues en jupe, parfois même, de manière symbolique, sur des pantalons, et chez les garçons, il y a peut être eu deux ou trois kilts", a précisé le porte-parole du rectorat.

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Hamon dément simplement. Le ministre de l'Education nationale, interrogé à ce sujet à l'Assemblée nationale mercredi a dénoncé les "mensonges colportés par des organisations radicales" et le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll l'a qualifié de "pseudo info".

Malgré tout, les groupes opposés au mariage homosexuel "Les Nantais pour la famille" et "Les Sentinelles" ont appelé à une action de protestation pacifique le 16 mai devant un des lycées concernés dans le centre-ville de Nantes.

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