Les jeunes manifestants, un sujet sensible

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Depuis l’affaire Malik Oussekine, les gouvernants redoutent la gestion des étudiants.

Jeudi matin, un lycéen a été blessé par un tir de flashball à Montreuil, en Seine-Saint-Denis, en marge des manifestations contre de la réforme des retraites. Victime d'un décollement de la rétine et de multiples fractures à la pommette, il a été opéré vendredi. La police des polices, l’IGS, a depuis été chargée de faire toute la lumière sur cet incident.

Le chef de file des députés UMP Jean-François Copé a été le premier à réagir vendredi. Il s'est déclaré “préoccupé par les premiers incidents auxquels nous avons assisté parce que, lorsqu'il y a des manifestations de lycéens, il y a forcément des risques de problèmes graves". Le ministre de l'Intérieur lui a depuis emboité le pas, en demandant à la police de "limiter l'usage de la force au strict nécessaire", dans un télégramme sur les "manifestations de lycéens et collégiens"

Le précédent Malik Oussekine

Mais ce qui, dans une manifestation classique, aurait pu être considéré comme un simple incident devient une affaire sensible lorsqu’il s’agit de lycéens. Leur irruption dans le mouvement est donc prise très au sérieux par le gouvernement, les consignes données par Brice Hortefeux visent à éviter un drame comme le fut la mort de Malik Oussekine.

Malik Oussekine, 22 ans, fut matraqué à mort dans le hall d'un immeuble parisien après une manifestation. Cette bavure, qui a profondément marqué le pays, a rapidement conduit au retrait de la loi Devaquet et la démission du ministre de l’Education. “C’est un fait marquant dans l’histoire du mouvement lycéen“, confirme-t-on du côté de l’UNL.

Dans la police, “la ligne de conduite, c’est d’éviter ce qui s’est passé en 1986. Cet évènement a entrainé le retrait de la réforme de l’université, cela a été décisif pour l’issue des manifestations“, rappelle Jean-Louis Loubet del Bayle, fondateur du Centre d'Etudes et de Recherches sur la Police (CERP), à l’université de Toulouse.

Des mouvements difficiles à encadrer

“Dans les défilés classiques, il y a le service d’ordre des syndicats qui encadrent la manifestation, souvent en coordination avec les forces de l’ordre“, analyse Jean-Louis Loubet del Bayle. “Il y a une ritualisation qui s’est opérée : manifestants et policiers ont intégré des comportements. Le dérapage arrivent quand les choses sont imprévisibles“, poursuit-il pour Europe1.fr. Or les manifestations lycéennes sont moins bien encadrées de celles de leurs aînés.

Pire, là où d’habitude persiste un semblant de dialogue, le contact entre la police et les organisations lycéennes fait cette fois-ci défaut. “D’habitude, on arrive à dialoguer, c’est beaucoup plus difficile en ce moment. Les forces de l’ordre ont des ordres clairs du gouvernement pour casser le mouvement“, confie-t-on du côté de l’UNL, le principal syndicat lycéen.

“S’il devait arriver des dérapages, quel est l’intérêt du gouvernement ? Ce dernier a intérêt à ce qu’il y ait de la casse matériel, l’opposition a intérêt à ce qu’il y ait des dérapages“, explique Jean-Louis Loubet del Bayle. Mais personne n’a intérêt à ce qu’il y ait un mort.