Le Canard enchaîné a disparu à Puteaux

Joëlle Ceccaldi-Raynaud aurait elle même fait chauffer sa carte bleue pour acheter 85 exemplaires du journal.
Joëlle Ceccaldi-Raynaud aurait elle même fait chauffer sa carte bleue pour acheter 85 exemplaires du journal. © MAXPPP
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et Emilie Denêtre , modifié à
La maire de la ville aurait fait acheter tous les exemplaires du journal où elle était épinglée.

Les ventes du Canard enchaîné atteignent des sommets à Puteaux... La maire de la ville, l'UMP Joëlle Ceccaldi-Raynaud, aurait fait acheter tous les exemplaires du journal satirique qui l'épingle dans une affaire de commissions occultes.

"L'ex-suppléante de Sarko planquait son magot dans des paradis fiscaux", titre le Canard du 19 octobre. Dans le détail, l'hebdomadaire assure que Joëlle Ceccaldi-Raynaud, proche de Nicolas Sarkozy, dont elle fut la suppléante à l'Assemblée nationale, est impliquée dans une affaire de pots-de-vin. Son père, Charles Ceccaldi-Raynaud, l'accuse d'avoir touché des commissions occultes.

Joëlle Ceccaldi-Raynaud a été entendue en août comme témoin assisté par un juge de Nanterre dans le cadre d'enquête sur les soupçons de malversations financières. Son père a été mis en examen pour favoritisme, "recel d'abus de bien sociaux et corruption passive".

Près de 600 journaux achetés par la mairie

Visiblement soucieuse que cette affaire ne soit pas connue des habitants de Puteaux, la député-maire UMP aurait demandé à son équipe de dévaliser tous les kiosques de la ville. Joëlle Ceccaldi-Raynaud aurait elle-même fait "chauffer" sa carte bleue pour acheter 85 exemplaires du journal, pour un montant de 102 euros.

Une initiative qui n'est pas passée inaperçue auprès des habitants de la ville et notamment des membres de l'opposition. "Les clients le demandent, on leur répond qu'on en a plus. Mais les gens ne sont pas bêtes, ils sont au courant de l'histoire", a raconté un buraliste, contacté par Rue89.

L'opération "achetez un Canard"

Le Canard enchaîné compte réapprovisionner les kiosques mais déplore un processus d'intimidation des vendeurs. "Non seulement la maire de Puteaux a fait acheter la quasi-intégralité des 600 exemplaires du Canard enchaîné mis en vente mais elle fait régner un climat de peur sur les kiosquiers, certains d'entre eux refusant d'être réapprovisionnés en raison d'éventuelles représailles", a déploré le journaliste du Canard, Hervé Liffran.

Si le Canard reconnaît que ces initiatives sont assez courantes, il parle toutefois d'un processus d'intimidation jamais vu auparavant. "Nous avons déjà vu des villes acheter un maximum d'exemplaires mais jamais elles n'ont cherché à empêcher le réapprovisionnement", a confié Hervé Liffran.

Le conseiller municipal d'opposition MoDem, Christophe Grébert, parle d'une démarche "ridicule", au micro d'Europe 1. "Ces accusations sont très graves. On comprend que le maire soit gêné que cette information circule dans la ville. Mais aujourd'hui, à l'heure d'Internet, à l'heure des réseaux sociaux, à l'heure des médias, empêcher la circulation d'une information en rachetant 600 exemplaires du Canard, c'est ridicule", a-t-il déploré.

En signe de protestation, Christophe Grébert a lancé une riposte sur son blog. "Je vous propose de participer à l'opération 'Offrez un Canard' à un habitant de Puteaux : achetez un Canard (enchaîné), trouvez l'adresse d'un Putéolien dans les Pages blanches (au hasard) et envoyez-lui !", peut-on lire. Selon des informations d'Europe 1, l'élu MoDem a également imprimé l'intégralité de l'article et compte le diffuser gratuitement, samedi, dans toute la ville.