Kucheida et les "cartes bleues justifiées"

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avec Lionel Gougelot , modifié à
L'ex-député maire PS de Liévin est jugé pour abus de biens sociaux auprès d'un bailleur social.

Voilà un procès qui intervient à un mauvais moment pour le PS, en pleine tourmente de l'affaire Cahuzac. L'ancien député-maire socialiste de Liévin, dans le Pas-de-Calais, Jean-Pierre Kucheida, est jugé depuis mardi pour abus de bien sociaux au détriment d'un bailleur social qu'il présidait : la Soginorpa. Sa fille, artiste, est également appelée à comparaître devant le tribunal correctionnel de Douai, dans le Nord. Tous deux risquent jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 375.000 euros d'amende.

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Six mois de prison avec sursis requis. Six mois de prison avec sursis ont été requis mardi soir. Le procureur de la République de Douai, Eric Vaillant, a également demandé 70.000 euros d'amende et une interdiction de toute fonction ou emploi public pour une durée inférieure ou égale à cinq ans à l'encontre de Jean-Pierre Kucheida, exclu du PS en mai 2012 pour candidature dissidente aux législatives. Le parquet a également réclamé devant le tribunal correctionnel de Douai (Nord) un mois de prison avec sursis pour la fille de l'ancien élu, poursuivie pour "recel d'abus de biens sociaux".  Le jugement devait être mis en délibéré.

Près de 50.000 de frais personnels. Jean-Pierre Kucheida est soupçonné d'avoir utilisé à des fins personnelles la carte bleue de la Soginorpa, qui gère environ 62.000 anciens logements miniers. Notes de restaurants étoilés, notamment chez Marc Veyrat en Savoie, achats de cadeaux ou encore dépenses lors de voyages privés : l'enquête a mis au jour près de 47.000 euros de frais personnels réglés avec la carte bleue de la société.

Il est également reproché à l'ancienne figure du PS dans le bassin minier d'avoir utilisé une carte d'essence d'un véhicule de fonction de la Soginorpa pour un usage professionnel sans lien avec cette société et le paiement présumé d'une somme de 12.000 euros de la Soginorpa à sa fille par l'intermédiaire d'une association.

"Je n'ai strictement rien à me reprocher". Une enquête avait été ouverte en mars 2012 à la suite d'une dénonciation des commissaires aux comptes de la Soginorpa. Lors de leur garde à vue au commissariat de Douai le 17 octobre, Jean-Pierre Kucheida et sa fille avaient "refusé de répondre" aux questions des policiers. Le parquet avait toutefois décidé de les poursuivre, estimant que l'enquête était "suffisamment complète" pour les mettre en cause.

Pour Jean-Pierre Kucheida, qui avait quitté la présidence du bailleur social en juin, ces dépenses "faites au service de la Soginorpa" sont "justifiées". "Je n'ai strictement rien à me reprocher", avait déclaré Jean-Pierre Kucheida à l'issue de sa garde à vue, dénonçant des "cochonneries", des "calomnies" qui l'ont "déshonoré, sali" après "41 ans de vie politique au service du bassin minier".

Interrogé par Europe 1, il crie au règlement de comptes politique dans son propre camp, visant notamment Martine Aubry et Arnaud Montebourg, et réaffirme sa bonne foi. "Ces dépenses de carte bleue, ce sont des dépenses que j'ai faite au service de la Soginorpa, je l'ai déjà dit, et je le répète. Elles avaient une justification professionnelle. Ça veut dire 5.000 euros de carte bleue par an, ça veut dire un repas et demi par mois. Vous trouvez que c'est exagéré ? Faites les comptes. Ces cartes bleues sont des cartes bleues justifiées", assure-t-il.

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Une enquête toujours en cours. Ce procès de l'ancien baron socialiste du Pas-de-Calais pourrait être une première épreuve pour lui, puisqu'il est également visé par des enquêtes sur le financement du PS dans le département et sur des marchés truqués. Celui qui s'est toujours targué de conserver l'amitié de François Hollande semble aujourd'hui bien seul. Exclu du Parti socialiste en mai 2012, pour candidature dissidente aux dernières élections législatives, il ne se représentera pas aux municipales l'an prochain à Liévin.