Karachi : la version de l'Elysée décryptée

Des syndicats de magistrats ont accusé jeudi l'Elysée d'avoir violé le secret de l'instruction en indiquant dans un communiqué avoir eu accès au dossier de l'affaire Karachi.
Des syndicats de magistrats ont accusé jeudi l'Elysée d'avoir violé le secret de l'instruction en indiquant dans un communiqué avoir eu accès au dossier de l'affaire Karachi. © MAXPPP
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et Pierre Rancé , modifié à
Son communiqué dit que Nicolas Sarkozy est "étranger" au dossier. Europe1.fr fait le point.

Alors que deux des proches du chef de l'Etat ont été mis en examen dans le volet financier de l'affaire Karachi, l'Elysée a démenti jeudi tout lien entre Nicolas Sarkozy et le financement de la campagne d'Edouard Balladur en 1995, dénonçant une "calomnie et une manipulation politicienne". Les enquêteurs cherchent à vérifier si les sommes récupérées dans le cadre de la vente de sous-marins au Pakistan aurait pu financer la campagne d'Edouard Balladur. Et des questions subsistent encore sur la connaissance que le président, ministre du Budget à l'époque, avait du circuit des commissions sur ces contrats d'armement. Europe1.fr revient sur les affirmations du communiqué de l'Elysée et tente de séparer le vrai du faux.

"Le nom du chef de l'Etat n'apparaît dans aucun des éléments du dossier, n'a été cité par aucun témoin ou acteur de ce dossier". Cette affirmation de la présidence de la République est exacte. Toutefois, son nom apparaît en 2010 dans un rapport de police luxembourgeois remis au juge Van Ruymbeke et qui enquête sur une société "écran" appelée Heine. Cette société offshore basée au Luxembourg, paradis fiscal, était destinée à recevoir et à payer les commissions légales que l'Etat français, par le biais de la direction des Constructions navales s'était engagé à verser à un certain nombre d'intermédiaires à l'occasion du marché des sous-marins vendus au Pakistan.

Les policiers luxembourgeois citent le nom de Nicolas Sarkozy, tout comme  celui d'Edouard Balladur, c'est parce qu'il fallait l'autorisation du ministre du Budget de l'époque et du Premier ministre pour créer cette société. Il n'a rien de répréhensible dans tout cela, sauf que cette société a été par la suite soupçonnée par les juges français de servir à la redistribution de rétrocommissions du contrat pakistanais qui auraient pu revenir en France après un circuit très complexe.

" A l’époque où il était ministre du Budget, Nicolas Sarkozy avait manifesté son hostilité à ce contrat" d'armement avec le Pakistan. L'argument de l'Elysée apparaît un peu curieux puisqu'il ne semble pas faire la différence entre les services du ministère du Budget, qui ont toujours été contre ce contrat, parce qu'ils jugeaient trop risqué sur le plan industriel et financier, et le ministre lui-même Nicolas Sarkozy, qui l'a finalement validé. Certes, il y a bien eu un débat à Bercy sur ce contrat d'armement, mais c'était surtout avec les services du ministère et pas forcément avec le ministre lui-même comme semble l'indiquer ce communiqué de l'Elysée.