Garde alternée : "la moins mauvaise solution"

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REGARDS CROISÉS - Alors que ce mode de garde gagne du terrain, les deux pédopsychiatres interrogés par Europe1 s'accordent au moins sur un point : le cas par cas prévaut.

Instituée par la loi du 4 mars 2002, la garde alternée concerne aujourd'hui un enfant de divorcés sur cinq, selon une étude du ministère de la Justice. Pour les parents comme pour les enfants, la "solution" a des avantages et des inconvénients. Que faut-il savoir avant de demander ce mode de garde ? Europe1 a posé la question à deux pédopsychiatres.

"La moins mauvaise solution" ? Catherine Jousselme, directrice du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent de la Fondation Vallée à Gentilly, préfère parler de "résidence alternée" que de "garde alternée" : "il y a une continuité de la garde qui est partagée mais la résidence, c'est-à-dire le lieu de vie, est alterné", explique-t-elle. La pédopsychiatre refuse d'avoir une idée arrêtée sur la question : "il y a des familles où ce mode de garde va être compliqué et des familles où ce sera simple, c'est au cas par cas", estime-t-elle.

Stéphane Clerget, praticien dans le service de psychiatrie enfantine à l’hôpital de Cergy-Pontoise, est, lui, clairement favorable à la garde alternée : "c'est la moins mauvaise des solutions", estime l'auteur de "Se séparer sans que les enfants trinquent" (Albin Michel, 2004). Pour lui, ce choix est même logique "lorsque le père et la mère sont impliqués dans l'éducation de leur enfant".

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La condition : "un minimum de communication entre les parents". Pour Catherine Jousselme, pour qu'une garde alternée fonctionne, il faut au préalable que les deux parents soient persuadés de leur capacité à faire une résidence alternée. Pour elle, un minimum de communication est nécessaire : "il faut une base possible", souligne-t-elle en jugeant "logique" que ce mode de garde soit plus répandu lorsque le divorce n'est pas contentieux. Stéphane Clerget, au contraire, n'est pas persuadé qu'une entente relative des parents soit nécessaire : "un divorce ne se passe jamais bien de toute façon", tranche-t-il.

Les enfants en bas âge : une vigilance particulière. La garde alternée reste rare pour les enfants en bas âge (lorsque l'enfant a moins de 6 ans, la garde quotidienne revient à 82% à la mère). Les pédopsychiatres ne la déconseillent pas pour autant. "C'est vrai que plus l'enfant est jeune et plus c'est compliqué : un bébé a des étapes fondamentales à passer et la discontinuité peut rendre le passage de ces étapes plus difficile", explique-t-elle en concluant : "cela demande des parents impliqués et vigilants".

Pour les enfants en bas âge, Stéphane Clerget défend lui "des modalités évolutives du cas par cas", "de la haute couture" comme il dit. Ainsi, pour les enfants de moins de trois ans, il estime qu'un roulement hebdomadaire n'est pas la formule la plus souhaitable : "cela fait trop long pour de jeunes enfants". Le spécialiste préconise donc une alternance un jour sur deux évoluant, quand l'enfant grandit, vers un roulement par semaine à partir de l'école primaire. Plus simple en théorie qu'en pratique ? "Je parle en tant que pédopsychiatre, pas en tant que juge", concède-t-il.

"Des moments charnières à travailler". "Il y a des problématiques à gérer dans la résidence alternée", pointe Catherine Jousselme. "Quand on retrouve son enfant, il est excité de vous voir mais il vient aussi de quitter l'autre parent, ce sont des moments charnières à travailler", estime-t-elle. "Cela doit être préparé en amont", recommande-t-elle en reconnaissant que "cela demande des liens assez subtiles entre les parents pour que l'enfant n'ait pas le cul entre deux chaises".

Le but ? "Il ne faut pas que l'enfant ait l'impression de vivre dans deux mondes clivés ou indépendants l'un de l'autre".