"Garantie universelle des loyers" : le hic

La garantie sur les loyers impayés, chère à Cécile Duflot s'avère très complexe à mettre en oeuvre.
La garantie sur les loyers impayés, chère à Cécile Duflot s'avère très complexe à mettre en oeuvre. © MAXPPP
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Thomas Morel avec G.S. et AFP , modifié à
Prévue dans le projet de loi de Duflot présenté mercredi, cette mesure a du mal à se concrétiser.

Jour J pour Cécile Duflot. La ministre du Logement a présenté mercredi, en Conseil des ministres, son projet de loi sur l'accès au logement, qui sera débattu au Parlement à la rentrée. Le projet renforce l'encadrement des loyers et prévoit à partir de 2016 une garantie obligatoire contre les loyers impayés, avec l'ambition de faciliter l'accès au logement dans les zones de forte demande. Mais il reste beaucoup de zone d'ombres.

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Les loyers devront baisser. Le mécanisme s'appliquera dans 28 agglomérations où il existe "un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande". Ces zones, dites "tendues", sont celles déjà soumises aujourd'hui à la taxe sur les logements vacants: l'agglomération parisienne, Marseille, Lyon, mais aussi Ajaccio, Montpellier ou encore le bassin d'Arcachon. Représentant en tout 4,6 millions de logements, soit 70% du parc de logements locatifs privés, elles seront dotées d'"observatoires locaux des loyers", chargés d'établir des statistiques sur le niveau des loyers pratiqués. A partir de ces données, un plafond sera fixé chaque année par les préfets, qui ne pourra pas dépasser "20% au-dessus du loyer médian de référence". Et tous les loyers situés au-dessus de ce niveau "auront vocation à être abaissés". En région parisienne, ce mécanisme devrait entraîner la baisse de plus d'un quart des loyers, estime le ministère sans plus de précision.

La garantie universelle, c'est quoi ? Ce projet part d'un constat simple : les propriétaires demandent à leurs locataires de plus en plus de garanties pour se protéger contre le risque d'impayé. A tel point qu'il est parfois difficile de décrocher un appartement si l'on n'a pas à la fois un CDI, un haut niveau de revenu et une, voire plusieurs cautions. Le principe de la garantie universelle des loyers, c'est de faire en sorte que tous les contrats de bail s'accompagnent d'une assurance contre les impayés, qui permettrait de garantir aux propriétaires qu'ils seront payés quoi qu'il arrive. Ceux-ci pourraient alors plus volontiers accepter de louer à des particuliers moins "sûrs". Le principe en avait été annoncé par le président de la République en janvier. Le projet de loi prévoit son entrée en vigueur le 1er janvier 2016.

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Pourquoi ça pose problème. Le hic, c'est que si tout le monde s'accorde sur le principe, la mise en application est beaucoup plus complexe. "Le principe est acté dans la loi, mais le dispositif concret n'est pas prévu", explique Laure Bourgoin, de l'association de consommateurs CLCV. "C'est compliqué, parce qu'il faut trouver le financement de ce mécanisme. En ce moment, on est dans une période de crise, et il est difficile de trouver les ressources nécessaires."

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Qui va payer ? Locataires, propriétaires ou Etat, chacun espère donc que les autres payeront. "A la CLCV, par exemple, nous sommes réticents à ce que les locataires versent à la fois un dépôt de garantie, comme on le leur demande aujourd'hui, et une contribution pour cette garantie universelle des loyers." Jean Perrin, le président de l'Union nationale de la propriété immobilière, estime de son côté qu' "on ne peut pas obliger les propriétaires à s'engager dans un système d'assurances". Faute d'avoir trouvé le moyen de mettre en pratique ce dispositif, il pourrait bien rester encore quelques temps un vœu pieu…

Le texte de Cécile Duflot ne tranche pas, car le ministère laisse le soin à une mission de préfiguration de faire des propositions à ce sujet, tout comme sur les modalités d'indemnisation des impayés. Cécile Duflot a en tout cas fait le choix de confier la gestion de cette garantie à un nouvel établissement public, l'agence de la garantie universelle des loyers, plutôt que de s'en remettre aux assureurs privés, comme le prônaient les représentants des propriétaires et des professionnels de l'immobilier.