Fraude : des "fables", répond Michelin

La justice soupçonne Michelin de dissimuler les arrêts maladie de ses employés.
La justice soupçonne Michelin de dissimuler les arrêts maladie de ses employés. © MAXPPP
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MS avec Stéphane Barnoin et Matthieu Bock , modifié à
Une enquête préliminaire a été ouverte contre l’entreprise, accusée de refuser les arrêts-maladie.

Le parquet de Clermont-Ferrand vient d’ouvrir une enquête préliminaire à l’encontre de Michelin. La justice soupçonne le géant du pneu de dissimuler les arrêts maladie de ses employés. C’est TF1 qui a révélé cette fraude qui coûterait environ un milliard d’euros par an à la Sécurité sociale.

"Ces accusations sont graves et fausses. J’en suis scandalisé", s'insurge sur Europe 1 Frantz Bléhaut, directeur des ressources humaines de Michelin France. "Tous les accidents du travail chez Michelin, qu’ils comportent un arrêt de travail ou non, sont déclarés. Il n’y a pas de caisse noire chez Michelin, aucun versement liquide. Ce sont des fables !", conclut-il.

A Cholet, Michelin a enregistré 0 arrêt-maladie

Pourtant Michelin est réputée modèle : l’entreprise comptabilise quinze fois moins d'accidents de travail que la moyenne. A Cholet, la société a atteint un record : zéro arrêt-maladie en 2010. Sur le document interne de l'infirmerie qu’Europe 1 s’est procuré, on lit 130 jours non déclarés à la Sécurité sociale. Pour ne pas payer d'amendes, l'entreprise forcerait ses salariés à venir travailler alors qu'ils devraient rester à la maison.

C’est ce qui s’est passé avec Laurent, qui souhaite garder l’anonymat. Le salarié de Michelin a raconté au micro d’Europe 1 comment a réagi sa direction lorsqu’il s’est bloqué le dos à son poste de travail. Son supérieur l’a accompagné à l’infirmerie et quand le médecin est parti, "la hiérarchie a décidé de me renvoyer chez moi" sans faire "aucune déclaration d’accident", explique-t-il.

"J’étais payé chez moi" :

Sa convalescence a duré une semaine et demi tout au plus. Il avait régulièrement au téléphone son responsable qui lui faisait comprendre qu’il devait "revenir en bon état et revenir vite surtout". Aujourd’hui, Laurent réalise que son accident "avait été plus grave, (s’il) avait eu des séquelles, étant donné qu’il n’a pas été déclaré, ça aurait été tout pour (sa) pomme".

"Peu importe leur santé"

Ce que déplorent principalement les syndicats, c’est que Michelin ne s’inquiète pas de la santé de ses salariés. "Peu importe leur santé. Le principal, c’est qu’il n’y ait pas d’accident déclaré. C’est que Michelin puisse annoncer qu’il a peu d’accident et ne pas payer la Sécurité sociale", explique Dominique Leclair de la CGT.

Et "peu importe votre état, il faut être au boulot", assure-t-il. Il a confié au micro d’Europe 1 qu’il avait appris que certains avaient eu un accident, plusieurs mois après. Pourquoi ? "Simplement parce qu’ils avaient changé de poste. Pas de leur plein gré. On les quasiment forcé à changer de poste, parce qu’ils ne pouvaient pas tenir le poste qu’ils tenaient avant a cause de leur accident".

Le syndicat affirme que la situation est la même dans toutes les usines françaises. Des affiches avertissent même les salariés sur les murs des vestiaires, expliquant que leurs arrêts-maladie coûtent très cher à l'entreprise : entre 1.000 et 2.000 euros par jour. Les premiers salariés doivent être interrogés d’ici la fin de semaine.