France Télécom face à ses vieux démons

Quelques heures après le suicide d'un salarié de France Télécom, les uns estiment que "chaque cas est particulier", les autres estiment que "le climat social n'est pas rétabli". © MAX PPP
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avec Stéphane Place et Benjamin Petrover , modifié à

Après le suicide d'un salarié mardi, les conditions de travail sont à nouveau pointées du doigt.

Incompréhension et colère, les sentiments se mêlent après l’immolation mardi d’un salarié de France Télécom-Orange sur le site de Mérignac, en Gironde. Quelques fleurs ont été déposées dans un seau à côté des traces de fumée sur le mur d'un des bâtiments qui témoigne du geste de ce salarié de 57 ans, père de quatre enfants. Un rassemblement a été organisé mercredi à la mi-journée devant l'immeuble où travaillait le salarié, au centre-ville de Bordeaux. Près de 300 personnes, dont ses collègues et ses proches, y ont participé.

Et près d'un an après une vague de suicide qui a coûté la vie à 58 personnes en un peu plus de deux ans, voilà les conditions de travail à nouveau pointées du doigt dans l'entreprise. "Comme beaucoup de cadres d’un certain âge à France Télécom, Rémi (le salarié qui s'est donné la mort) a perdu l’emploi qu’il occupait il y a 7-8 ans, et depuis il n’était pas forcément sur un emploi pérenne", a précisé à Europe 1 Bernard Benquet, de la CFDT Gironde.

"Accélérer le processus mis en place"

Tous reconnaissent que des efforts ont été faits depuis l'arrivée le 1er février 2010 de Stéphane Richard au poste de PDG. Mais la base peine à profiter de ces efforts. "Il y a une impulsion que tout le monde reconnaît au niveau de la nouvelle direction. Sauf que cette impulsion doit se concrétiser sur le terrain, au plus proche des salariés", estime Patrick Pierron, secrétaire national CFDT en charge des questions du travail. "Les représentants des salariés ont demandé d’accélérer le processus mis en place car les accords signés au niveau national ils ne sont pas encore redescendus dans les entités du groupe."

C’est ce qu'a confirmé d’ailleurs Sébastien Crozier, délégué CFE-CGC-UNSA de France Télécom. "Nous avons constaté une diminution significative du nombre de suicides", a-t-il expliqué au micro d’Europe 1, même s’il a estimé que "pour autant, le climat social n’est pas complètement rétabli".

Il a jugé "inévitable que d’autres actes dramatiques se produisent dans l’entreprise" :

Pour la famille de la victime, aucun doute. "Son suicide est lié à son travail", selon son fils aîné. "La raison de son suicide, c'est clairement la manière dont France Télécom-Orange a fait dérouler sa carrière"

Une enquête a immédiatement été ouverte par la direction de l'entreprise, soucieuse de ne pas réveiller ses vieux démons. "On n’exclut absolument rien, et toute la transparence sera faite sur son parcours dans l’entreprise", a promis Delphine Ernotte, directrice exécutive d'Orange France, qui a fait le déplacement sur le site de Mérignac mardi. "C’est vrai qu’on ne reconstruit pas une entreprise en quelques mois. Mais nous sommes déterminés à mener ce projet à bien."