Corse : Taubira dévoile son arsenal

La circulaire de politique pénale spécifique à la Corse présentée lundi par la garde des Sceaux, Christiane Taubira, vise à rendre la justice "plus performante".
La circulaire de politique pénale spécifique à la Corse présentée lundi par la garde des Sceaux, Christiane Taubira, vise à rendre la justice "plus performante". © MAX PPP
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Frédéric Frangeul avec Pierre de Cossette et agences , modifié à
La ministre de la Justice a détaillé lundi ses mesures pour lutter contre le crime organisé sur l’île.

"La violence et l'affairisme ont atteint dans l'île un niveau qui est sans commune mesure avec les autres régions françaises, et qui menace les fondements mêmes de la société". Le constat effectué par Christiane Taubira sur la situation en Corse est sans appel. Pour y remédier, la ministre de la Justice a présenté lundi matin à Bastia une "circulaire de politique pénale territoriale pour la Corse" pour rendre la justice "plus performante".

Lutter contre l’affairisme. L’objectif numéro un de la garde des Sceaux, c’est la lutte contre l’affairisme et la délinquance financière. Pour stopper ces dérives, les établissements et intermédiaires financiers sont invités à signaler à la justice tout mouvement de fonds suspects, préconise la circulaire pénale.

Concrètement, la lutte contre la délinquance financière se matérialisera par une plus grande implication de Tracfin, l’organisme chargé de lutter contre la fraude financière,  sur l’île de Beauté. Le pôle économique et financier de Bastia sera lui renforcé de quatre personnes.

Traquer les mouvements de fonds suspects. Si elle ne vise aucune profession en particulier, la circulaire Taubira cite les secteurs du BTP, de la sécurité, des jeux et du sport comme "propices" au blanchiment.  Pour une meilleure efficacité dans ce combat, Christiane Taubira recommande d'intensifier "les relations avec les présidents de la chambre régionale des comptes, de la juridiction administrative et des services financiers et fiscaux".

Cette volonté gouvernementale de mettre à contribution tous les acteurs de la vie économique locale pour circonscrire la délinquance financière fait écho aux propos tenus par Manuel Valls, le 16 novembre dernier, quand le ministre de l’Intérieur avait stigmatisé l’attitude des notaires. "Ils sont silencieux", avait-il déploré.  

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Sur Europe 1 lundi matin, le  président du Conseil régional des notaires corses a répliqué à Manuel Valls. "Il est mal renseigné", a-t-il affirmé au micro d’Europe 1. "Les notaires de la République en Corse font leur travail. Ils le font dans le respect de la loi mais avec discernement", a-t-il ajouté.

Améliorer la coordination judiciaire. Pour stopper le cycle de la violence en Corse, Christiane Taubira réclame "la plus grande efficacité judiciaire". Pour y parvenir,  le ministre a annoncé la création d’un "Comité  stratégique régional d’échange et de coordination" dont la mission sera de centraliser "les suspicions de pratiques illicites". Avec une la volonté de mieux faire circuler l’information entre les services.

En outre, pour mettre un terme aux tensions récurrentes entre les magistrats corses et leurs homologues de la juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) deMarseille, Christiane Taubira a annoncé la création d’une "instance de régulation", basée à Paris.

Délier la parole des témoins. Enfin, Christiane Taubira souhaite briser l’omerta qui entoure les dossiers corses pour obtenir "un meilleur taux d'élucidation des affaires". A cette fin, la garde des Sceaux précise que les faits de "corruption passive ou active, menaces ou subornation", feront "systématiquement" l’objet d’une enquête. De leur côté, les témoins anonymes peuvent déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou de la gendarmerie".

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La garde des Sceaux est toutefois consciente de la difficulté de la tâche qui l’attend en Corse. Sur France Info, lundi matin, elle reconnaissait que se fixer un délai pour "ramener la paix publique et des conditions de vie normales" en Corse, serait "vaniteux".