Combien de libérations pour erreur juridique ?

Des détenus vont devoir être liberés à cause d'une erreur du ministre de la Justice en 2004.
Des détenus vont devoir être liberés à cause d'une erreur du ministre de la Justice en 2004. © MAXPPP
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avec Guillaume Biet et AFP , modifié à
Des détenus vont devoir être libérés à cause d'une erreur du ministre de la Justice en 2004.

L'info. La décision de la Cour de cassation est technique mais lourde de conséquence. Dans un récent arrêt, la plus haute juridiction française a invalidé un décret pris en 2004 par le Garde des Sceaux de l'époque, Dominique Perben (UMP). Conséquence, des détenus pourraient être libérés car leurs peines seraient alors considérées comme prescrites, révèle Le Canard Enchaîné mercredi.

Une erreur technique. La bourde de Dominique Perben concerne les personnes condamnées en leur absence, qui étaient ensuite recherchées pour exécuter leur peine. Normalement, au bout d'un certain temps (5 ans pour les délits, 20 ans pour les crimes), la peine est prescrite. Sauf si un acte judiciaire intervient, ce qui relance le délai. En 2004, le Garde des Sceaux avait modifié la liste de ces actes dans un décret. C'est ce que reproche la Cour de cassation.

L'arrêt de la Cour. Dans un arrêt du 26 juin, la Cour de cassation a ainsi donné raison a un franco-arménien, condamné par contumace en 1989, et qui souhaitait regagner la France, après la prescription de 20 ans en matière criminelle. Mais il lui avait été opposé une série d'actes de procédure interrompant la prescription. La liste de ces actes avait été fixée, selon le Canard enchaîné, par un décret de 2004. Or la Cour de Cassation a tranché que seule une loi pouvait la définir. L'erreur avait depuis été réparée avec l'adoption d'une loi en 2012. Mais la Cour de Cassation a donné raison au demandeur, qui contestait la validité des actes interruptifs opposés à sa demande de prescription.

Des centaines de dossiers à vérifier. Conséquence de cette décision, la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice a dû demander aux différentes juridictions de vérifier la situation "des personnes condamnées et écrouées au-delà du délai de prescription de la peine". Le 10 juillet dernier, elle a ainsi envoyé une note à tous les parquets, leur demandant de vérifier si les actes de procédures pris en compte pour interrompre la prescription étaient valables.

Six détenus libérés. Près de 3.500 dossiers vont donc devoir être réexaminés. La Chancellerie a annoncé mardi soir, qu'après avoir étudié la situation dans un tiers des cours d'appel (13 sur 36 en France), soit 848 dossiers, six personnes ont pour le moment été remises en liberté.

Taubira outrée. La ministre de la Justice, Christiane Taubira, a fustigé mercredi le "laxisme de la droite", à l'origine de cette erreur. La  garde des Sceaux a assuré qu'elle étudiait "toutes les mesures de droit" possibles pour éviter les libérations du fait de prescription de peine. Elle a assuré que certaines "personnes concernées (...) n'ont pas été libérées parce que d'autres peines ont pu être mises à exécution", de sorte à "les maintenir en détention".