Les laboratoires Servier ont été reconnus coupables de "tromperie aggravée" dans le scandale du Mediator (photo d'archives). 1:33
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avec AFP , modifié à
Les laboratoires Servier ont été reconnus coupables de "tromperie aggravée" et condamnés à 2,7 millions d'euros d'amende dans le scandale du Mediator, un antidiabétique détourné comme coupe-faim commercialisé pendant plus de trente ans malgré sa toxicité. 

Plus de dix ans après le retentissant scandale du Mediator, un médicament tenu pour responsable de centaines de décès, le tribunal de Paris a reconnu coupable lundi à Paris les laboratoires Servier de "tromperie aggravée" et d'"homicides et blessures involontaires". "Malgré la connaissance qu'ils avaient des risques encourus depuis de très nombreuses années, (...) ils n'ont jamais pris les mesures qui s'imposaient et ainsi trompé" les consommateurs du Mediator, a déclaré la présidente du tribunal correctionnel, Sylvie Daunis, au début de la lecture du délibéré.

Une amende de 2,7 millions d'euros pour le groupe

Condamné à payer 2,7 millions d'euros d'amende - le maximum pour la qualification retenue par le tribunal -, le groupe pharmaceutique a toutefois été relaxé du délit d'"escroquerie". Jean-Philippe Seta, l'ex-numéro 2 du groupe pharmaceutique et ancien bras droit du tout-puissant Jacques Servier, décédé en 2014, a lui été condamné à quatre ans d'emprisonnement avec sursis. Le parquet avait requis à son encontre cinq ans dont trois ferme et 200.000 euros d'amende.

L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM, ex-Afssaps), qui a "gravement failli dans sa mission de police sanitaire", a elle été condamnée à 303.000 euros d'amende. Le parquet avait requis une amende de 200.000 euros.

Un médicament prescrit pendant 33 ans 

Lors du procès-fleuve ouvert en septembre 2019 et clos en juillet 2020, une question a été centrale: comment le Mediator a-t-il pu être prescrit pendant trente-trois ans malgré les alertes répétées sur sa dangerosité ? Pour l'accusation, les laboratoires Servier ont sciemment dissimulé les propriétés anorexigènes (coupe-faim) et les dangereux effets secondaires de ce médicament, utilisé par 5 millions de personnes jusqu'à son retrait du marché en 2009.

Dans ses réquisitions, en juin, la procureure Aude Le Guilcher a appelé à "restaurer la confiance trahie" en sanctionnant le "choix cynique" et le "sinistre pari" d'une firme ayant privilégié "ses intérêts financiers" à la santé des consommateurs du médicament, malgré "les risques qu'elle ne pouvait ignorer". Un total de 10,228 millions d'euros d'amendes avait été demandé à l'encontre de la maison-mère et de cinq sociétés du groupe pharmaceutique.