L'obtention d'un nouveau travail peut perturber l'équilibre dans un couple. 5:22
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Catherine Blanc , modifié à
Jeudi, dans "Sans Rendez-Vous" sur Europe 1, la psychanalyste et sexologue Catherine Blanc répond à Sabine. Cette auditrice raconte que son mari a obtenu il y a quelques semaines un nouveau poste avec de lourdes responsabilités qui l'occupent énormément. En parallèle, Sabine remarque qu'ils n'ont plus de relations sexuelles et se demande si tout ceci est lié.

Commencer un nouveau travail s'accompagne bien souvent d'un stress et d'une volonté de bien faire. Dans "Sans Rendez-vous", la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc tente de comprendre comment ces aspects peuvent interagir avec la libido.

La question de Sabine

"Mon mari a obtenu il y a quelques semaines un nouveau poste avec de hautes responsabilités. Il travaille énormément, rentre tard les soirs et n'est plus souvent présent les week-ends. Or, depuis, nous n'avons pas eu de relation sexuelle, est-ce lié ?"

La réponse de Catherine Blanc

"La libido peut dépendre de la charge émotionnelle, de la préoccupation et de l'inquiétude que nous tentons de gérer et d'apaiser au quotidien. Il faut une disponibilité suffisante pour faire l'amour. Dans quatre matins, peut-être que ça développera sa libido, parce qu'il se sentira grand, puissant et reconnu et que cette évolution professionnelle va plutôt dorer son narcissisme et sa virilité. Quand on accède à des postes importants, on est aussi regardé comme quelqu'un d'important. Donc ça donne un sex-appeal par voie de compétences.

Mais dans un premier temps, il faut être à la hauteur du job, donc ça remet en questionnement l'idée que je me fais de moi, des mes compétences, de mes capacités. Quand on prend n'importe quel job, dans un premier temps, il y a trois mois où on est un peu sous l'eau pour prendre ses marques et faire la preuve de ses compétences. Du coup, on est toujours en train de se dire : 'Ils pensent que je suis capable, mais moi je ne m'en sens pas capable.' Et ce, jusqu'à ce qu'on acquiert la certitude de sa capacité. Pendant ce temps-là, évidemment qu'on n'a pas la disponibilité pour montrer qu'on est un super-héros par ailleurs.

N'est-ce pas aussi à cause du stress et de la fatigue ?

Dans ce cas de figure, il n'est pas disponible, il rentre tard, il s'épuise. On l'avait dit à d'autres occasions sur d'autres sujets, notamment à propos des mamans quand elles ont mis au monde des enfants. Il y a des tétées, des tétées, des tétées, des préparations de repas, des nettoyages de couches... Évidemment que tout cela épuise. Un être humain n'est pas capable d'être Shiva, d'être sur 1.000 sujets à la fois et performant sur tous les sujets. Évidemment qu'on peut être fier de son mari parce qu'il a ce haut poste, on peut comprendre qu'il soit très fortement mobilisé, on peut se sentir un peu abandonné aussi, peut-être, mais encore une fois, il faut attendre aussi que le temps passe suffisamment, l'accompagner, lui faire confiance, parce que justement c'est de confiance qu'il a besoin.

Le travail ne remplace-t-il pas en quelque sorte le plaisir charnel dans cette situation ?

Alors c'est vrai que quand nous travaillons, nous y mettons toute notre ambition, donc tout notre désir. Nous y mettons notre plaisir, comme dans la compétence que nous avons de satisfaire la demande de l'autre. Donc, on retrouve les mêmes histoires que ce qui se joue dans la sexualité. Et parfois justement, nous y mettons beaucoup de notre libido, parce qu'on a besoin de toute cette libido mise au service du travail pour pouvoir accomplir la tâche, jusqu'à ce qu'on puisse découvrir que notre libido, on peut la segmenter dans des tas d'autres domaines. Pour l'instant, il est dans la jubilation et la jouissance de ce qu'il met en oeuvre. Mais je pense plutôt que dans un premier temps, c'est une volonté de se mettre à la hauteur et non pas déjà d'être dans la jouissance.

Ne faut-il pas couper un week-end ?

Je ne pense pas qu'il suffise d'un week-end comme ça. Je pense que des week-ends sont accordés de toute façon et ce sont certainement des moments de sommeil et de réparation.

Doit-elle lui mettre un ultimatum ?

C'est un peu brusque... Imaginez si l'on se disait pareil pour les femmes qui sont en train de s'occuper leur bébé... Cela reviendrait à dire : 'Bon, vous allez mettre votre bébé en pause, vous laissez votre enfant pendant un week-end et emballé, c'est pesé !'. C'est intéressant, ça permet de voir que toute chose qui nous fait souffrir et sur laquelle on voudrait une réaction ou un agissement un peu brusque, essayons de l'imaginer dans le sens inverse pour voir si c'est acceptable."