LA QUESTION SEXO - Faut-il parler de sexualité avec son ado ?

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Catherine Blanc , modifié à
Dans l'émission "Sans rendez-vous" sur Europe 1, la sexologue Catherine Blanc répond à une auditrice qui s'interroge sur la nécessité d'avoir une discussion familiale sur la sexualité avec son adolescente.
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Parler de sexualité avec son enfant peut s'avérer complexe. Il y a des choses à faire et ne pas faire... Mais lesquelles ? Dans l’émission Sans rendez-vous,sur Europe 1, Catherine Blanc, sexologue et psychiatre, répond à la question d'une auditrice qui s'interroge sur le bien-fondé d'une discussion portant sur la sexualité avec son adolescente.

La question de Sidonie

"Ma fille est adolescente, je ne voudrais pas qu’elle s'aventure dans la sexualité sans connaissance, mon mari propose de nous réunir tous les trois pour, schéma à l'appui, lui expliquer comment ça marche, qu'en pensez-vous ?"

La réponse de Catherine Blanc

Ce n'est pas nécessairement la meilleure des idées, tout simplement parce que, d'abord, on attend le désir d'un enfant d'avoir des explications : ou bien poser des questions, ou de manière plus sibylline, en tout cas sentir qu'il y a des interrogations, des inquiétudes ou des manques dans le comportement.

À partir du moment ou une enfant ne sait pas comment se comporter, qu'elle passe de la pudeur à un jeu exagéré de féminité, peut-être faut-il l'aider à comprendre qu'il y a des choses qui se jouent dans l'image qu'elle renvoie : ce que ça induit, si elle se sent capable d'assumer cela. Parce qu'on observe des choses dans le non-verbal. 

Est-ce que, si elle est demandeuse, on peut envisager une telle réunion ? 

Tout dépend à qui elle veut poser les questions, parfois la présence d'un des parents n'est pas une très bonne idée, selon les enjeux des relations. Le mieux c'est de dire 'il me semble que tu as beaucoup de questions, veux-tu que je te répondes ? est-ce que tu préfères que ce soit papa ? veux-tu qu'on ait une discussion à bâtons rompus, où tu nous poses des questions auxquelles on essaye de répondre l'un et l'autre, parce qu'on a chacun nos points de vue ?' Il n'est pas question d'exclure le père, si c'est une fille, et la mère, si c'est un garçon. Ceci étant, contraindre à l'exercice obligé peut être mal vécu par l'adolescent. 

Faut-il anticiper, commencer à parler sexualité aux ados et si oui, à quel âge on commence ? 

Je crois qu'il ne faut pas tellement parler de sexualité mais par contre il faut commenter la sexualité qui est partout, parce qu'elle est dans les films, même les films normaux. Souvent, la famille se fige devant l'écran, ou détourne le sujet 'alors tes devoirs tu avances bien ?', c'est assez touchant parce que le malaise est perceptible, souvent chez l'adulte, et l'enfant ne manque pas de le percevoir. Le pire serait qu'il y ait des commentaires gourmands des parents qui mettent mal à l'aise l'enfant.  

Et si l'enfant manifeste du dégoût ? 

Il faut demander pourquoi il a cette réaction, ou dire 'je comprends, ce n'est pas encore ton âge'. Dans l'éducation sexuelle d'un enfant, ce qui est important, c'est de l'aider à verbaliser, à comprendre ce qu'il dit lui-même et à cheminer - car il changera d'avis, il aura d'autres points de vue - plutôt que de dire 'c'est comme ça, tu aimeras ça, tu feras ça'. C'est extrêmement enfermant et c'est très anxiogène, car l'enfant aura l'impression qu'on l'enferme dans la sexualité parentale.

Est-ce que l'enfant a vraiment besoin des parents, ne doit-on pas le confier à quelqu'un d'autre ?

On peut bien sûr le confier à quelqu'un d'autre, car parfois, parler de sexualité à ses parents n'est pas souhaitable, on a le sentiment d'un mélange des genres. Verbaliser est déjà une expression de sexualité et le partager, avec ses parents, peut sembler incestueux. Mais les parents peuvent être justement là pour désamorcer ce que les copains ou la pornographie véhiculent.

Le plus souvent les enfant disent 'ça va' et claquent la porte, et il faut le respecter. Il ne faut pas aller leur courir après, ou se balader avec un sac de préservatifs. On ne prend pas en traître, car on rentre dans la sphère intime. Mais on peut leur proposer s'ils le souhaitent. Ou alors on mandate un ami, qui jouera le rôle d'un parrain ou d'une marraine.