Jean-Claude Amesein : "Prévenir une épidémie, c'est pouvoir apporter de l'aide à tout le monde"

Jean-Claude Amesein, président du comité consultatif national d’éthique
Jean-Claude Amesein, président du comité consultatif national d’éthique
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A.D et Anne Sinclair
L'immunologiste Jean-Claude Amesein était l'invité d'Anne Sinclair, samedi. Il insiste sur l'importance de protéger les personnes et les pays les plus fragiles.

Très proche de la nature, Jean-Claude Amesein, président du comité consultatif national d’éthique, de retour du 11e sommet mondial des comités d’éthique et de bioéthique, était l'invité de l'interview d'Anne Sinclair, samedi. Le médecin a largement abordé la question de la prévention des épidémies.

L'éthique ? Protéger les plus vulnérables. Quel rapport entre la prévention des épidémies et l'éthique ? Jean-Claude Amesein explique que l’éthique prend sa source dans la protection des personnes les plus vulnérables. "La mise à disposition, le plus rapidement possible, des moyens qui permettent d’identifier le virus ou l’infection en cause est un problème d’éthique biomédicale, de formation des médecins, d'information des populations aussi. Cela n’est pas qu’un problème technique, c’est une question de compréhension."

Le même niveau de santé "pour tout le monde". Dans beaucoup de catastrophes naturelles (comme les tremblements de terre, ouragans, etc), c'est une erreur de croire, d'après lui, que tout le monde est touché de la même manière. "On ne peut pas prévenir les épidémies, les catastrophes, si le corps médical n’est pas suffisamment formé, si les moyens de communication et de soins sont insuffisants et si les personnes n’ont pas un minimum de force ou sont dénutries."

Ebola et la canicule de 2013. Le médecin prend l'exemple du virus Ebola, où le plus grand nombre de morts n'a pas été dû au virus en lui-même mais à d'autres maladies qui n'ont pas pu être soignées faute d'un nombre suffisant de médecins et d'hôpitaux. Tout se joue donc en amont. "Prévenir des victimes d'une épidémie, ce n'est pas simplement lutter contre l'épidémie, c'est faire en sorte que l'aide soit apportée à tout le monde." Dans une moindre mesure aussi, dans les pays plus riches, ce sont les personnes les plus fragiles qui sont touchées. Cela a été le cas des personnes âgées isolées lors de la canicule de 2003.

Le vaccin : une cohabitation avec la nature. Pour le médecin, la pollution, déforestation, l’épuisement des sols, la pêche et l'agriculture intensives reviennent également à défavoriser en premier lieu les populations les plus faibles. Il engage à vivre en harmonie avec la nature et regrette ainsi que la vaccination soit régulièrement décriée puisqu'il s'agit selon lui d'un excellent moyen de cohabiter avec la nature : "la vaccination fait monter en nous des moyens de nous protéger contre ce qui est autour, sans détruire et sans tout désinfecter."

"Vivre mieux plutôt que vivre plus longtemps". Il rejette néanmoins en bloc le retour à l'état de nature : "l'état naturel, c’est 5 millions d’enfants de moins de 5 ans qui meurent dans les pays pauvres pour des maladies dont nous avons les vaccins et dont ils ne peuvent pas disposer." Il ne prône pas pour autant, grâce à la recherche, un allongement de la durée de la vie à tout prix : "ce qui est intéressant comme augmentation, ce n'est pas la durée de la vieillesse mais celle de la jeunesse. Mais plutôt que de vivre plus longtemps, l’important est de savoir si ce que nous faisons permet de vivre mieux individuellement et collectivement."