Phytothérapie, compléments alimentaires, huiles essentielles : comment se soigner par les plantes sans se mettre en danger ?

Camomille plantes phytothérapie
La camomille est réputée avoir des vertus apaisantes. © Congerdesign / Pixabay
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Un rapport de l’Académie de pharmacie publié jeudi alerte sur la dangerosité de certains produits à base de plantes. Voici cinq conseils pour limiter les risques liés à la phytothérapie.

Faîtes attention, le naturel n’est pas forcément bon pour la santé. C’est, en substance, le message envoyé jeudi par l’Académie nationale de pharmacie, qui publie un rapport sur les produits de phytothérapie. Compléments alimentaires à base de plantes, tisanes, huiles essentielles, gélules… La France est le premier pays consommateur de ce type de produits en Europe. Et pour cause : ils ont de nombreuses vertus. Les uns aident à maigrir, les autres à calmer notre stress, d’autres encore servent à combattre le rhume ou à prévenir les infections urinaires. Dans certains cas, ils offrent mêmes de précieux compléments aux traitements médicamenteux. Mais ils peuvent aussi comporter de nombreux risques pour la santé. Alors, comment les consommer sans danger ? Nos conseils.

1) Attention au dosage

Il n’est pas toujours facile de savoir ce que contient un produit à base de plantes, tels qu’un complément alimentaire ou une gélule achetés en magasin "bio". Souvent, leur emballage ne contient d’ailleurs pas la liste précise des ingrédients, ni leur volume. Or, une surconsommation de ces produits peut comporter de nombreux risques. Les compléments alimentaires à base de suc d'aloé, de racine de rhubarbe ou de séné, utilisés pour leur effet laxatif, souvent dans le cadre de régime minceur, sont par exemple pointés du doigt par l’Académie de pharmacie.

Leur "usage prolongé provoque une dépendance. A long terme, des lésions définitives de la paroi interne de l'intestin peuvent apparaître", écrit-elle. Pour les utiliser sans danger, il faut donc respecter un dosage strict. "Il ne faut pas en prendre plus de trois fois par jour, et jamais plus de dix jours", met ainsi en garde Jean-Pierre Foucher, président honoraire de l’Académie de pharmacie et auteur du rapport, contacté par Europe 1. Ce dernier plaide par ailleurs pour une interdiction pure et simple des compléments alimentaires les plus dangereux.

" Le meilleur interlocuteur reste le pharmacien, même si tous ne sont pas efficacement formés… "

De manière générale, pour connaître la dose quotidienne de plantes à consommer, que cela soit pour un complément alimentaire, une gélule ou une tisane, "le meilleur interlocuteur reste le pharmacien, même si tous ne sont pas efficacement formés…", poursuit le chercheur en pharmacognosie. Pour être sûr d’avoir un avis pertinent sur le dosage, n’hésitez donc pas à aller voir plusieurs pharmaciens. Les spécialistes en phytothérapie l’affichent souvent sur leur vitrine ou la porte de leur officine. Nous vous conseillons également de vous documenter, en commençant par exemple par ces deux ouvrages : Moins de médicaments, plus de plantes, de Laurent Chevallier, médecin et consultant en nutrition et Du bon usage des plantes qui soignent, du pharmacien et ethnopharmacologue Jacques Fleurentin.

2) Ne mélangez pas certaines plantes à certains médicaments

Il faut l’avoir en tête lorsque l’on veut se soigner avec les plantes : certaines sont totalement incompatibles avec certains traitements médicamenteux. Evitez donc les mélanges qui pourraient s'avérer nocifs. "C’est le cas par exemple du soja avec les médicaments anticancéreux, du millepertuis avec la pilule contraceptive, les antidépresseurs, les anticoagulants et de nombreux autres médicaments, du pamplemousse avec les médicaments contre le cholestérol, le diabète et des anticancéreux… Pour éviter les erreurs, si vous suivez un traitement, demandez à votre médecin avant de consommer des plantes", prévient le pharmacien Jean-Pierre Foucher.

3) Respectez bien la fonction de chaque plante, et la manière de la consommer

Chaque plante a sa vertu. Mais toutes les plantes ne sont pas bonnes pour tout. Ainsi, la canneberge va prévenir la récidive des infections urinaires mais elle ne guérira pas les infections urinaires importantes. Aussi, il s’agit de faire attention à la manière de consommer les plantes. "Certaines peuvent se révéler toxiques si l’on s’écarte d’un usage bien établi. Par exemple, la germandrée, traditionnellement utilisée en tisane, s’est révélée, sous forme de poudre, nocive pour le foie", relate le Figaro Santé.

Qui rappelle également que dans certaines plantes, les vertus ne sont pas les mêmes en fonction de la partie que l’on consomme : "Dans le sureau, la fleur est diurétique et le fruit possède une activité contre le rhume. Chez l’ortie, la partie aérienne calme les douleurs rhumatismales et la racine soulage les problèmes de miction liés à l’hypertrophie bénigne de la prostate. Autre exemple, la fleur de tilleul est connue pour ses propriétés anxiolytiques alors que le bois d’aubier de tilleul va plutôt avoir une action dépurative". Pour éviter les erreurs, demandez conseil à un pharmacien compétent, ou documentez-vous avant de vous lancer (voir livres cités plus haut).

4) Ne vous fournissez pas n’importe où

En France, 400 références de plantes à vertus dites "thérapeutiques" sont autorisées (la liste à retrouver ici). Pour s’en procurer, les experts conseillent plutôt d’aller en pharmacie. Reste que 148 références ne s’y trouvent pas : on les achète sur internet ou dans les magasins bio. Avant de vous en procurer, surtout sur internet, vérifiez que le produit et ses composants sont bien autorisés à la vente, et n’hésitez pas à demander conseils à un professionnel de santé.

L’enjeu est de taille, car certains produits sont parfois trompeurs, surtout s’ils viennent du bout du monde. Le desmodium par exemple, une plante africaine souvent présentée comme ayant des vertus pour le foie, peut provoquer des hépatites.

5) Pour les huiles essentielles, une prudence particulière est de mise

Irritation, brûlures, taches sur la peau, problèmes respiratoires, allergies… Les conséquences potentielles d’un mauvais usage des huiles essentielles sont nombreuses. La plupart du temps, les effets indésirables font suite à un surdosage, ou à la consommation des huiles par des publics à risque, comme les enfants ou les femmes enceintes. Il est donc important de respecter les mêmes conseils que pour les autres produits phytosanitaires.

En outre, ne les consommez jamais pures. Par voie orale, contentez-vous d’une ou deux gouttes dans du miel, sur un morceau de sucre ou dans du pain par exemple. Si vous souhaitez les diffuser dans l’air, munissez-vous d’un diffuseur strictement prévu pour les huiles essentielles. Par ailleurs, les huiles du thym à thymol, de la sarriette, du girofle, de la cannelle et de l’origan compact ne sont absolument pas prévues pour ça. En cas de rhume ou de sinusite, vous pouvez également inhaler de l’huile essentielle d’eucalyptus. Une ou deux gouttes dans un bol d’eau chaude, dont vous respirez les vapeurs, suffisent. Mais attention : l’huile essentielle d’eucalyptus est totalement déconseillée aux enfants. Enfin, si vous souhaitez en mettre dans votre bain, redoublez de vigilance : diluez d’abord dans une cuillère à soupe de lait ou un peu d’alcool à 90. Et contentez-vous de 15/20 gouttes pour 180 litres d’eau (plus d’informations sur les huiles essentielles dans notre article ici).