Apparition, diagnostic, traitement… cinq choses à savoir sur la fatigue chronique

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Pauline Rouquette
À la différence d'une fatigue physique classique, il existe un type de fatigue qui se réveille de manière chronique et se caractérise par d'autres mécanismes, s'installant sur le long terme : il s'agit du syndrome de fatigue chronique. Un syndrome encore méconnu en France, expliqué par le neurologue François Authier, vendredi, sur Europe 1.
DÉCRYPTAGE

À l'automne, nombre d'entre nous se sentent soudainement fatigués et doivent laisser leur corps s'habituer au changement de saison. Mais il en est pour qui la fatigue revient continuellement et présente des caractéristiques plus préoccupantes. Il s'agit alors peut-être d'un syndrome de fatigue chronique, qui n'a rien à voir avec la fatigue classique que l'on ressent en cas de surmenage ou de manque de sommeil. Un syndrome dont le professeur François Authier, neurologue à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil, est spécialiste. Il était l'invité vendredi de l'émission Sans rendez-vous avec Aline Richard, rédactrice en chef du Figaro Santé, partenaire du Figaro Santé.

Le syndrome de fatigue chronique, c’est quoi ?

Le syndrome de fatigue chronique, par définition, se distingue de la fatigue classique par le fait qu’il soit chronique. Celui-ci peut débuter à la suite d’une infection, mais il peut aussi émerger sans raison. La personne développe alors une fatigue qui lui donne l'impression d'être grippée, mais au lieu de s'arranger en quelques jours, semaines, cet état s’installe durablement. "On n'arrive pas à en sortir, on arrive à faire de moins en moins de choses, que ce soit des activités physiques, des activités intellectuelles, on dort mal, on se réveille fatigué…", énumère le professeur François Authier. "Bref, on a une vie qui est en train de se réduire de manière dramatique".

Aussi, bien qu’il soit reconnu par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le syndrome de fatigue chronique reste très méconnu en France. "C’est très pénible parce que les patients qui ont cette maladie, qui est très organique, sont des gens qui, pourtant, vont très bien", explique le professeur François Authier. "Ils ont une vie normale, des enfants, une vie active, un travail, et n'ont aucune raison d'être ni déprimés, ni quoi que ce soit". Pourtant, un jour, brutalement, "ils deviennent malades et on ne leur trouve rien". C’est d’ailleurs ‘une des caractéristiques de ce syndrome de fatigue chronique, de ne pouvoir être diagnostiqué facilement via des examens conventionnels. 

Comment le diagnostiquer ?

Le meilleur moyen de se faire diagnostiquer est de se rendre chez un spécialiste et d’effectuer un bilan de fatigue et de sommeil, comme le propose le service de la professeure Isabelle Arnulf à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Mais il est possible, en amont, de répondre à un auto-questionnaire sur internet.

Le problème, rappelle Aline Richard, c’est que la fatigue, qu’elle soit chronique ou non, ne se quantifie pas. Aucun marqueur ne permet de calculer la fatigue lors d’une prise de sang, par exemple. Si l’on a recours à ces auto-questionnaires disponibles en ligne, il est donc important de se rendre chez un spécialiste avec les résultats pour qu’il les analyse, plutôt que de tenter soi-même une interprétation, insiste la rédactrice en chef du Figaro Santé.

Pourquoi certaines personnes développent ce syndrome ?

Selon le professeur Authier, il y a beaucoup d'hypothèses sur le sujet. "On n’est pas encore très calé sur les tous les mécanismes, mais ce qui est certain, c'est qu'il y a probablement des syndrome de fatigue chronique différents", explique-t-il, ajoutant que le travail des médecins est ici de tenter de "stratifier, isoler" des cas relevant de mécanismes spécifiques.

"Schématiquement, on peut dire que probablement, on a une réaction immunitaire excessive, on a du mal à désamorcer la réaction immunitaire", poursuit-il, évoquant ce qui se passe, par exemple, lorsqu’une personne fait un syndrome post-infectieux. Mais "on a, sur le long terme, un état qui est beaucoup plus apathique, où les gens développent des troubles cognitifs, des difficultés… C'est une espèce de phase où l’on a vraiment un aspect dégénératif, et c'est cette évolution du syndrome de fatigue chronique qui est extrêmement caractéristique".

Combien de personnes sont atteintes ?

Ce syndrome peut toucher toutes les classes d'âge, mais étant peu reconnu en France, il est difficile d’obtenir des statistiques. "C'est un problème énorme, car comment voulez-vous organiser une lutte contre une pathologie sans avoir une bonne idée de ce que c’est ?", questionne Aline Richard, selon qui il pourrait y avoir des centaines de milliers de personnes atteintes de ce symptôme.

"On a estimé que c’était entre 0,3 et 1% de la population générale", précise le professeur Authier, évoquant des études réalisées au Royaume-Uni. "Ce qui veut dire que c’est quand même beaucoup plus fréquent qu’on ne le pense".

Quelle prise en charge ?

En cas de fatigue chronique, faut-il, comme cela est conseillé pour les états de fatigue classique, de pratiquer certaines activités physique ? "C'est beaucoup plus compliqué", prévient le professeur François Authier, expliquant que le syndrome de fatigue chronique se caractérise par un "malaise post-effort" qui contribue à l’accentuation des symptômes dès lors que le sujet fait un effort trop important.

Selon le neurologue, des efforts trop intenses sont au contraire éviter. En cas de syndrome de fatigue chronique, poursuit-il, mieux vaut privilégier une activité fragmentée et diversifiée. "Il faut arriver à changer le type d'activité sur des petites séquences, avec des pauses entre chaque, ce qui fait que vous pouvez arriver à faire un certain nombre de choses sans avoir trop de dommages".