Vote des étudiants : "La question de l'emploi est centrale pour cet électorat"

Les étudiants sont une clientèle électorale plus volatile que le reste de la population. CHARLY TRIBALLEAU / AFP
Les étudiants sont une clientèle électorale plus volatile que le reste de la population.
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Thibaud Le Meneec
Pour le politologue de l’Ifop François Kraus, les étudiants, plus indécis que le reste des électeurs, sont moins préoccupés par la sécurité ou l'immigration que par la question sociale.
INTERVIEW

"Pas sans les jeunes !", lancent-ils. Mercredi, une dizaine d’associations et de syndicats étudiants ont interpellé les candidats à la présidentielle en leur transmettant 25 propositions pour améliorer la condition des jeunes adultes. Europe 1 se penche sur les caractéristiques de cet électorat particulier avec François Kraus, de l’Ifop, co-auteur d’une enquête sur les étudiants, publiée en novembre dernier.

Quel est le poids électoral des étudiants en France ?

Les étudiants de l’enseignement supérieur et les apprentis sont 2.610.000 à être inscrits sur les listes électorales cette année, qui comprennent au total 47 millions de personnes. Cela équivaut à environ 5% du corps électoral. Mais tous les étudiants ne se sont pas inscrits, notamment en raison de l'importance de leurs mobilités.

Pour qui votent-ils ?

On imagine les étudiants syndiqués, très majoritairement à gauche, mais c’est faux. Dans les filières professionnelles, les jeunes sont plus sensibles au discours du Front national, comme leurs milieux d’origine. Ensuite, il y a une fracture entre les filières sélectives et non-sélectives, en droit et en médecine d’un côté, qui penchent à droite, et les sciences humaines et sociales de l’autre, marquées à gauche. Globalement, les étudiants se distinguent des autres jeunes par un taux de civisme plus élevé, et une tentation populiste plus faible. Mais le Front national progresse, tandis qu'un certain désenchantement des partis politiques devrait favoriser l’abstention. Dans la dernière enquête, la plupart d’entre eux considérait d'ailleurs qu’aucun candidat ne prenait en compte leurs préoccupations.

" On observe une montée du pragmatisme "

Par quels thèmes sont-ils les plus intéressés ?

Ils sont dans l’ensemble moins sensibles aux questions régaliennes, à l’accueil des migrants ou à la sécurité des personnes. À l’inverse, ils sont surtout préoccupés par des problématiques plus sociales comme l’emploi ou le logement. Pour l’emploi, par exemple, 63% des étudiants interrogés dans l’étude affirment que cet enjeu va compter dans leur choix pour l’élection présidentielle, un score plus fort que le reste des Français.

Leurs positions ont-elles évolué sur certains points ?

On observe une montée du pragmatisme, avec des générations d’étudiants moins idéologisés que dans les années 1960 ou 1970. Ils s’ouvrent des options de droite, voire d’extrême-droite. En 2011, ils étaient 44% à être favorables à la sélection à l’entrée de l’université. Ils sont aujourd’hui 52%. Et 39% d’entre eux sont pour une augmentation des droits d’inscription dans l’enseignement supérieur, contre 24% en 2012.

Est-ce un électorat plus volatile ?

Les choix politiques se mûrissent au fil des expériences. Les primo-votants, pas forcément ancrés dans leurs positions, sont amenés à être un peu moins sûrs de leurs choix. Le taux d’indécision sera plus fort que les années précédentes, en raison de l’offre électorale chamboulée et des candidats pas forcément étiquetés.