Comment Frédéric Thiriez veut rapprocher les hauts fonctionnaires des Français

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Séverine Mermilliod
Frédéric Thiriez a présenté son rapport sur la Haute fonction publique au Premier ministre mardi. Il était l'invité d'Europe 1 pour présenter ses propositions, parmi lesquelles la création d'une toute nouvelle école pour remplacer l'ENA et le rapprochement des corps de la fonction publique.

Il y aura toujours une grande école de la fonction publique, mais ce ne sera plus l'ENA. En tout cas si le gouvernement suit les recommandations du rapport présenté mardi par Frédéric Thiriez, avocat, ancien énarque et ex-président de la Ligue du football professionnel. Pas question, donc, de simplement "changer le nom". Ce que souhaite Frédéric Thiriez, c'est rapprocher les élites de la réalité des Français et du terrain, et de lutter contre le corporatisme. "Si le gouvernement me suit, il n'y aura plus d'ENA", assure-t-il sur Europe 1.

"Le rôle d’un haut fonctionnaire n’est plus de pondre des décrets"

"La haute fonction publique ne va pas bien", rappelle l'avocat selon qui un fossé se creuse entre les élites et la société française. Chaque année, dit-il, le nombre d'inscrits aux concours baisse. Alors pour y remédier, "il faut que nos hauts fonctionnaires soient plus divers : une diversité géographique, de sexe, plus imaginative, plus créative. Le rôle d’un haut fonctionnaire n’est plus de pondre des décrets dans un bureau à Bercy, c’est d’être des managers du changement", insiste Frédéric Thiriez.

Pour ce faire il préconise donc de créer, à la place de l'ENA, "une nouvelle grande école qui aura un profil totalement différent", puisqu'elle "réunira les ex-énarques et les ingénieurs de l'Etat - des Mines, des Ponts, de l'armement, de l'Insee. Cela fait partie de l'objectif qui était le mien dans ce rapport : décloisonner. Faire travailler les gens ensemble, qu’on soit issu de la filière administrative ou technique".

Car il y a aussi d'autres organismes qui forment les hauts fonctionnaires : l'école de Police, d'Administration pénitentiaire, les écoles de la Magistrature, des Hautes études en santé publique... Frédéric Thiriez propose un tronc commun à toutes, "dans l'objectif de lutter contre le corporatisme, cet esprit de caste qu'on reproche souvent aux Hauts fonctionnaires". 

"Avant de contrôler l'administration, il faut la connaître" : un tronc commun et du terrain

Son projet ne fait pas l'unanimité au sein de la magistrature, notamment la préconisation de trois semaines de préparation militaire. "La justice est indépendante, les magistrats ne sont pas là pour apprendre à marcher au pas ou répondre aux ordres. C’est l’inverse des objectifs pédagogiques de l’Ecole nationale de la magistrature actuellement", critiquait, mardi sur Europe 1, Céline Parisot, la présidente de l'Union syndicale de la magistrature.

Dans le projet de Frédéric Thiriez, tous ces futurs hauts fonctionnaires, reçus au concours, partiraient six mois pour travailler ensemble, sur le terrain. "Six semaines d'engagement, trois semaines de préparation militaire, et trois semaines d'encadrement de jeunes du Service national universel". Ensuite, quatre mois sur le terrain par équipes de sept - donc un par école, "dans une administration, une ville, un hôpital, etc, pour régler un problème très concret, une mission d'administration." Enfin, ils suivraient quinze jours d'enseignement de sensibilisation aux valeurs du service public, à la déontologie, aux relations sociales, humaines, à la communication. Après quoi ils regagneraient leurs écoles respectives.

Et comme selon l'auteur du rapport sur la Haute fonction publique, "avant de contrôler l'administration, il faut la connaître", les diplômés ne rejoindraient pas tout de suite la haute fonction mais partiraient d'abord pour deux ans sur le terrain avant. Des propositions qui d'après Frédéric Thiriez ont été plutôt bien reçues par l'ensemble des Hauts fonctionnaires.

L'idée d'un concours spécifique d'entrée pour les "élèves les plus brillants mais aux revenus modestes", elle, fait encore débat au sein du gouvernement. En revanche, 20 classes préparatoires supplémentaires seraient créées pour intégrer ces élèves.