Prendre en compte le vote blanc ? "À partir d'un certain seuil, il faudrait faire un troisième tour"

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Romain David , modifié à
Emmanuel Macron a soulevé lundi soir la possibilité d'une prise en compte du vote blanc aux élections. Pour Olivier Durand, président de l'Association pour la reconnaissance du vote  blanc, cela permettrait d'affiner le choix des électeurs et de limiter le nombre de mécontents à l'issue d'un scrutin.
INTERVIEW

Le chef de l'Etat a remis un vieux débat sur la table. Dans son allocution de lundi, Emmanuel Macron a dit vouloir "que soit posée la question de la prise en compte du vote blanc". Si le vote blanc permet à l'électeur de faire savoir qu'aucun des choix qui lui sont proposés ne le satisfait, il a toujours valeur de vote nul. "Au premier tour, c'est la possibilité pour un électeur de parler à son camp, de dire qu'il n'est pas content du candidat qui a été choisi. […] Au second tour, c'est une façon de dire que son candidat a disparu et que ceux qui restent ne sont pas satisfaisants", explicite au micro de Matthieu Belliard, sur Europe 1, Olivier Durand, le président fondateur de l'Association pour la reconnaissance du vote blanc.

Un vote à part. Depuis 2014, la loi a opéré un léger changement quant à la considération du vote blanc, sans que l'on puisse parler d'une véritable prise en compte. Le vote blanc est désormais décompté séparément du vote nul, mais il n'est toujours pas intégré au nombre de suffrages exprimés. "Même si on a voulu le séparer des bulletins nuls, il reste annulé", déplore Olivier Durand. "On peut comprendre que si le président Emmanuel Macron l'a mis dans ses propositions, c’est que les 'gilets jaunes' ont souvent répété qu'on ne les entendait pas, et peut-être aussi le jour d'une élection", analyse-t-il.

 

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La possibilité d'un troisième tour. Pour rappel, lors de la dernière présidentielle, 1,78% des votants a glissé un bulletin blanc dans l'urne au premier tour, et 8,52% au second tour. Par le passé, la proportion de votes blancs a pu directement interroger la légitimité du candidat élu. "En 1995, Jacques Chirac n'aurait pas eu la majorité absolue si l'on avait compté les votes blancs, François Hollande non plus", souligne Olivier Durand. "On nous dit qu'il y aurait eu un troisième tour, que ça coûte de l'argent. Mais est-ce que pendant le mandat de Jacques Chirac, qui n'a pas fait grand-chose, ou celui de François Hollande, qui s'est très vite retrouvé bloqué, le pays n'a pas perdu de l'argent ?", interroge-t-il. "À partir d'un certain seuil, il faudrait faire un troisième tour avec d'autres candidats", estime-t-il.

Un signal envoyé par les électeurs. En juillet 2017, un amendement déposé par des députés issus de la droite, et soutenu par une partie de l'opposition et du MoDem, allié du parti présidentiel au sein de la majorité, proposait la prise en compte du vote blanc. Il a été rejeté par 124 voix contre 54. "Le blocage est dans la tête des élus, du personnel politique. Dès qu'ils deviennent élus, ils ont peur du citoyen. Pour eux, lui donner le vote blanc, c'est risquer une marée blanche", poursuit le responsable associatif. "Le personnel politique doit voir le vote blanc comme quelque chose qui peut leur signaler, avant qu'il ne soit trop tard, un mécontentement qui devient élevé. Ça peut permettre de le surmonter avant que des gens soient amenés à manifester", ajoute-t-il, dans une référence à peine voilée aux blocages des dernières semaines.