Pourquoi les partis veulent à tout prix 15 députés

Pour les "petits" partis, l'objectif des législatives est d'abord d'obtenir un groupe à l'Assemblée.
Pour les "petits" partis, l'objectif des législatives est d'abord d'obtenir un groupe à l'Assemblée. © BERTRAND GUAY / AFP
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Ce seuil fatidique est celui nécessaire pour pouvoir constituer un groupe à l'Assemblée. Ce qui assure aux partis plus de rentrées financières, plus de poids politique et plus de visibilité.

Pour La République en Marche! (LREM), l'objectif de ces élections législatives est bel et bien de remporter la majorité absolue (289 sièges). Les Républicains, de leur côté, espèrent bien disputer aux candidats pro-Macron leur hégémonie à l'Assemblée. En difficulté, le Parti socialiste voudra limiter la casse. Mais pour les autres partis, un seul but : faire élire au moins 15 députés.

Ce seuil, établi avec la réforme constitutionnelle de 2008, leur permettra en effet de constituer un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale. Ce qui a, en pratique, de nombreux avantages.

Plus de poids politique. Le premier est de leur donner plus de poids politique. Les sièges au sein de toutes les instances, et notamment les huit commissions parlementaires permanentes (Commission des Lois, Commission des Finances, etc.) sont en effet distribués à la proportionnelle entre les groupes. Ces commissions examinent projets et propositions de loi avant leur discussion en séance publique et peuvent donc les infléchir considérablement. Les places au Bureau de l'Assemblée nationale, plus haute instance collégiale de la chambre, se répartissent également entre les membres des groupes.

Par ailleurs, chaque groupe a, à sa tête, un président qui participe à la Conférence des présidents. Celle-ci fixe le calendrier des débats et peut s'opposer à l'examen d'un projet de loi si elle estime, par exemple, qu'il manque d'étude d'impact. Enfin, une fois par mois, les groupes d'opposition et minoritaires peuvent imposer un ordre du jour. Autant de prérogatives qu'aucun député "non-inscrit", c'est-à-dire n'appartenant à aucun groupe, ne pourra avoir.

Plus de visibilité. Les temps de parole aussi, sont répartis à la proportionnelle entre les groupes parlementaires. C'est le cas lors des discussions pour l'examen d'un texte, mais aussi pour les questions au gouvernement. L'exercice hebdomadaire permet plus aux élus de montrer à leurs administrés qu'ils s'emparent de certains sujets qu'à réellement peser sur la vie publique.

Par ailleurs, les élus au sein d'un groupe bénéficient de la force du collectif pour imprimer leurs idées sur la scène médiatique. À chaque fois que les députés se prononcent sur un texte, la consigne de vote de chaque groupe est relayée dans les médias. Difficile de faire valoir son positionnement lorsqu'on est non-inscrit, à moins de bénéficier d'une notoriété considérable par ailleurs (comme c'était le cas, par exemple, de Marion Maréchal-Le Pen et Gilbert Collard, seuls élus du Front national dans la dernière Assemblée).

Des moyens supplémentaires. Former un groupe parlementaire, c'est aussi l'assurance de se voir octroyer des moyens supplémentaires. L'Assemblée nationale verse en effet des dotations financières à chaque groupe en fonction du nombre de députés qui le composent. Cet argent peut notamment permettre d'employer des collaborateurs, ce qui facilite grandement le travail parlementaire. En outre, des bureaux et des salles de réunion sont mis à la disposition des groupes.

Tous les partis le savent : sans groupe, il est très difficile d'exister à l'Assemblée. À tel point que bien souvent, des "groupes techniques" sont formés par des élus qui n'appartiennent pas au même parti. L'année dernière, il y avait 26 non-inscrits dans l'Hémicycle, un record. Ces députés s'étaient d'ailleurs concertés pour envoyer une lettre au président de l'Assemblée, Claude Bartolone, et lui demander plus d'équité dans le temps de parole. En vain.