Saint-Sébastien percé de flèches : voilà à quoi risque de ressembler Emmanuel Macron, trop affranchi, trop populaire, devenu une cible politique. L'image du fondateur du mouvement "En marche !" a encore été écorné mardi. Accusé par le fisc d'avoir sous-évalué son patrimoine, le ministre de l'Economie devra s'acquitter de pénalités de retard et payer l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), d'après des informations révélées par Mediapart. La polémique pourrait bel et bien affaiblir le ministre.
L'ennemi est à l'intérieur. Preuve que le coup porté est douloureux : le ministre a eu du mal à contenir sa colère mardi quand les journalistes sont venus l’interroger sur son patrimoine. "Cela fait plusieurs semaines que ça cogne fort", confirme son entourage, après ce qu'il considère comme à des fuites malveillantes. D'où viennent-elles ? De l’administration fiscale, qui dépend de Bercy, le propre ministère d’Emmanuel Macron. L’ennemi est à l’intérieur.
Une mauvaise nouvelle pour l’exécutif, car cela veut dire qu’au sein de l’équipe gouvernementale, tous les coups sont permis. Ce n’est pas un scoop : Emmanuel Macron agace une bonne partie des ministres qui ne lui pardonnent pas sa liberté. Beaucoup jalousent la mansuétude du président à son endroit. Sans parler de sa rivalité politique avec le Premier ministre, Manuel Valls. Jusqu'ici, on prenait des gants, mais ce n'est visiblement plus le cas. Du côté de l'Elysée, on s'agace : ces informations fiscales n’auraient jamais dû sortir.
"Ce qui ne tue pas rend plus fort". Comment réagit le ministre de l'Economie ? "Moi ? Je crois en Nietzsche : ce qui ne tue pas rend plus fort. Je continue sur le fond, j’agis, la multitude des attaques ne signe que la nervosité du système", répond-il. Plus on l’attaque, plus cela montre, selon lui, qu’il fait bouger les lignes.
Cela l'affaiblit-il politiquement ? Emmanuel Macron est dans une période test, un baptême du feu. Il veut démontrer qu’on peut, avec une belle popularité dans les sondages et la promesse de faire du neuf, bousculer tous les codes de la politiques. Des codes qu’il refuse, qu’il dénigre même. "Etre élu est un cursus de l’ancien temps", disait-il. Une démarche ambitieuse, mais risquée pour deux raisons. D'abord parce que le ministre est seul contre tous et pense pour lui, quand le président lui demande d’être dans une dynamique collective et solidaire. Mais aussi parce que que si la guerre qu’il a déclarée au système devient violente, au point que les coups tordus se multiplient au sein du gouvernement, alors le chaos et le désordre qu’il aura semé pourrait lui coûter son poste de ministre.