Pass sanitaire : ce qu'a validé et censuré le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel examinait jeudi la loi promulguant le pass sanitaire et instaurant la vaccination obligatoire des soignants.
Le Conseil constitutionnel examinait jeudi la loi promulguant le pass sanitaire et instaurant la vaccination obligatoire des soignants. © AFP
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Europe 1 avec AFP , modifié à
Le Conseil constitutionnel examinait jeudi la loi instaurant le pass sanitaire et la vaccination obligatoire des soignants. Les sages du Palais-Royal ont notamment censuré les dispositions imposant un isolement obligatoire aux personnes testées positives au Covid-19.
L'ESSENTIEL

La loi instaurant le pass sanitaire et la vaccination obligatoire des soignants a été validée jeudi par le Conseil constitutionnel, qui a en revanche censuré les dispositions relatives à l'isolement obligatoire des personnes diagnostiquées positives au Covid-19. "Le législateur a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé", notent les Sages à propos du pass et de la vaccination des soignants. 

Le pass sanitaire est déjà entré en vigueur en juillet dans les "lieux de loisirs et de culture" rassemblant plus de 50 personnes. Avec la nouvelle loi, il doit être étendu aux cafés, restaurants, foires et salons professionnels, ainsi qu'aux avions, trains, cars longs trajets et aux établissements médicaux sauf urgence. Les jeunes entre 12 et 17 ans en sont exemptés jusqu'au 30 septembre.

L'isolement obligatoire des cas positifs au Covid-19 retoqué

Les juges constitutionnels ont estimé que l'isolement obligatoire des malades de 10 jours n'était ni "nécessaire, adapté et proportionné" en ce qu'il constitue une mesure privative de liberté "sans décision individuelle fondée sur une appréciation de l'autorité administrative ou judiciaire". Cette mesure est donc censurée.

Le pass sanitaire sera bien demandé dans les cafés, les restaurants et certains centres commerciaux 

Le pass sanitaire pourra être exigé dans les cafés et les restaurants dès lundi, y compris en terrasse. Les Sages ont estimé que son instauration pour les activités de loisirs et de restauration commerciale, et pour les débits de boisson, était justifiée, au nom d'une "conciliation équilibrée" entre les exigences de protection de la santé et des libertés individuelles. Le pass s'appliquera également dans certains centres commerciaux et grands magasins, selon une liste qui reste à définir par les préfets.

La vaccination des soignants et le pass sanitaire à l'hôpital validé

Le Conseil ne trouve également rien à redire à l'obligation vaccinale pour les soignants et d'autres professions en contact avec des personnes à risque. Le Conseil constitutionnel a également validé l'obligation du pass sanitaire pour les visiteurs ou les patients non urgents dans les établissements de santé et maisons de retraite tant que ce dernier ne fait pas "obstacle à l'accès au soins". "La loi ne peut faire échec à l'accès aux soins", a précisé une source proche du Conseil constitutionnel, ajoutant que la décision sera laissée à "l'appréciation des soignants".

Le ministre de la Santé Olivier Véran a souligné jeudi que "personne ne sera privé de soins en fonction du pass sanitaire", lors d'une visite au centre hospitalier d'Aix-en-Provence. "Jamais nous n'arrêterons de soigner qui que ce soit", a insisté le ministre lors d'une rencontre avec les soignants, juste avant que le Conseil constitutionnel ne valide le dispositif.

La rupture anticipée d'un CDD ou intérim censurée

Le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions de la loi sanitaire prévoyant qu'un CDD ou contrat d'intérim puisse être rompu "avant son terme" par l'employeur faute de pass sanitaire, validant en revanche la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération. "En prévoyant que le défaut de présentation d'un pass sanitaire constitue une cause de rupture anticipée des seuls contrats à durée déterminée ou de mission, le législateur a institué une différence de traitement entre les salariés selon la nature de leurs contrats de travail qui est sans lien avec l'objectif poursuivi", indique le Conseil constitutionnel.

Les Sages soulignent que le législateur "a entendu exclure" que le défaut de pass "puisse constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement d'un salarié en contrat à durée indéterminée". Ils jugent que la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération pour les salariés concernés par l'obligation de pass sanitaire n'est pas contraire à la Constitution.

Ils observent notamment que la mesure est temporaire, l'obligation du pass ne courant que jusqu'au 15 novembre, que la suspension prend fin lorsque le salarié produit "les justificatifs requis" ou encore qu'un salarié peut se voir proposer un autre poste au sein de l'entreprise.

Une loi controversée

L'institution garante du respect de la Constitution et des droits fondamentaux avait été saisie par le gouvernement et trois groupes de parlementaires, après l'adoption du texte par députés et sénateurs le 25 juillet au terme de six jours de débats houleux. Le pass - certificat de vaccination, test négatif ou attestation de rétablissement -, contesté par plusieurs formations politiques allant de LFI au RN en passant par le PS, est aussi vivement dénoncé dans la rue par des manifestations qui se succèdent depuis un mois tous les samedi. La dernière a réuni quelque 200.000 personnes, et des appels ont déjà été lancés pour samedi prochain à travers la France.

Mais aucune des objections -atteinte "disproportionnée" aux libertés, problèmes des contrôles confiés à des serveurs de restaurant ou des contrôleurs de la SNCF par exemple, "obligation vaccinale déguisée" etc. - n'ont été retenues.