La primaire à gauche n'aura pas lieu

© PHILIPPE HUGUEN / AFP
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M.B. et David Doukhan
Les autres partis de gauche n'ont pas entériné le principe d'une primaire. Et une élection interne au PS est à exclure si François Hollande est candidat.

La décision est attendue lundi. Le tribunal de grande instance de Paris doit se prononcer sur la tenue d'une primaire à gauche. Trois militants socialistes, inquiets du non-respect des statuts du PS, l'ont en effet saisi début mai pour obliger le parti à organiser une élection interne. Mais poursuites judiciaires ou non, la primaire à gauche n'aura pas lieu.

Les écolos et le PCF font bande à part. De fait, un scrutin qui verrait s'affronter les candidats de toutes les formations politiques de gauche est inenvisageable. Les écologistes ont tranché la question lors d'un vote interne, où les partisans de la primaire n'ont obtenu que 16% des suffrages. Même chose du côté des communistes. Lors d'un conseil national qui s'est tenu en avril, une large majorité des militants a approuvé une motion affirmant qu'ils étaient "disponibles" pour une primaire... mais qu'ils ne soutiendraient François Hollande "en aucun cas" si celui-ci devait en sortir vainqueur. Désormais, le PCF ne parle plus que de "socle commun" et envisage même une candidature communiste pur jus, en plus de celle de Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier, quant à lui, refuse catégoriquement de participer à une primaire. C'est donc simple et clair : il n'y aura pas de primaire de la gauche.

Pas de primaire pour Hollande. Pourrait-on, dès lors, envisager une primaire interne au PS ? Quelle que soit la décision de justice, c'est peu probable. Si François Hollande est candidat, c'est même hors de question. L'Élysée comme Matignon ne veulent pas en entendre parler. Pour Manuel Valls, l'esprit des institutions de la Ve République passe avant les statuts du Parti socialiste. Imaginer un président de la République en déjeuner officiel avec Angela Merkel, Jean-Claude Juncker ou Xi Jinping avant, le soir, de passer sur une chaîne d'information pour se mesurer à une brochette de frondeurs et, pourquoi pas, l'un de ses ministres, serait ubuesque. À Matignon, on considère donc qu'il revient à Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS, de se débrouiller avec les statuts pour éviter une primaire.

Trop de candidats à gauche. Si l'absence de primaire permet de se présenter sans problème, elle augmente, en revanche, le risque d'élimination dès le premier tour en multipliant les candidats. Avec Philippe Poutou (LCR), Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), Pierre Laurent (PCF), Jean-Luc Mélenchon, Cécile Duflot (EELV), Bastien Faudot (MRC, parti chevènementiste) et François Hollande (PS), il y aurait sept concurrents à gauche. S'il prenait à Arnaud Montebourg de se lancer, il y en aurait même huit... exactement comme en avril 2002. Sauf que cette fois, tous se partageront un patrimoine électoral famélique. Selon une enquête Ipsos pour Le Monde publiée il y a trois jours, la gauche ne totalise que 32% des intentions de vote au premier tour. Un taux historiquement bas, et 10 points en dessous de son niveau de 2002.

Arithmétique et dynamique. Une primaire de la gauche avec les écologistes, les communistes, le MRC et François Hollande pour le PS aurait au moins eu l’immense avantage de réduire le nombre de candidats à quatre. La dispersion des voix aurait été limitée avec, à la clef, une meilleure chance pour François Hollande de se hisser au second tour. L'absence de primaire n'est donc pas forcément une bonne nouvelle pour le président, du moins d'un point de vue purement mathématique. Mais la politique n’est pas que de l’arithmétique. C'est aussi une dynamique. François Hollande a maintenant un peu moins d'un an pour le démontrer.