La loi Travail, "un psychodrame pour rien", selon Jacques Attali

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Margaux Baralon , modifié à
TOUT ÇA POUR ÇA -

L'écrivain et économiste a jugé un retrait de la loi El Khomri "impossible" et prôné pour n'en maintenir que l'article 2.

"Il y a des moments où il n'y a pas de bonnes solutions." Invité sur Europe 1 mardi, Jacques Attali s'est montré très pessimiste sur l'avenir du projet de loi Travail. Selon lui, l'exécutif s'est enlisé dans un conflit social avec ce texte car "le projet de départ était mal conçu" et "les amendements ensuite ont déplacé le projet sur les terrains qui intéressaient les partenaires sociaux mais n'avaient rien à voir" avec l'emploi. 

Ne garder que l'article 2. Pour celui qui pilote le programme "France 2022", "retirer [la loi Travail] est impossible car cela donne le sentiment que l'on cède à des grèves de blocage du pays". Mais il est tout aussi impossible de "le maintenir". "Quoi qu'il arrive, ce projet de loi va disparaître" avec les élections de 2017. "Le prochain président de la République va le changer. On a une sorte de psychodrame pour rien", estime Jacques Attali. Lui propose donc de "ne maintenir que l'article 2", qui entérine la primauté des accords d'entreprise sur les accords de branche. Un article "emblématique du fait qu'il ne faut pas céder au chantage d'un pays" et qui "crée les conditions d'une augmentation du pouvoir syndical en donnant du pouvoir à la majorité dans les entreprises".

Un projet pour 2017. Pour Jacques Attali, la mauvaise gestion du projet de loi Travail devrait servir d'exemple aux candidats à la présidentielle 2017. Et les pousser à être les plus clairs et les plus exhaustifs possible en présentant leur programme. "On ne peut pas gouverner sans débattre. L'opinion est contre, à juste titre, les choses qui tombent du ciel et ne sont pas placées dans une vision du monde, dans un programme", explique celui qui a conseillé plusieurs présidents. Mais l'économiste garde peu d'espoir que son conseil soit suivi. "Il n'y a pas encore de projet d'ensemble, et je pense que, tel que c'est parti, il n'y en aura pas avant longtemps", déclare-t-il en parlant des candidats à la primaire de la droite.

Marine Le Pen à l'Élysée en 2022. Jacques Attali va jusqu'à prédire que ce manque de vision globale pourrait porter l'extrême droite au pouvoir. "Je pense que je connais le prochain président de la République, celui de 2022 : c'est Marine Le Pen", regrette-t-il. Sans soutenir clairement qui que ce soit, l'écrivain s'est dit favorable à une candidature de François Hollande. "Il serait légitime que le président de la République reste candidat. Ce serait un aveu d'échec qu'il ne le soit pas." Quid de son soutien supposé à Emmanuel Macron, qui avait été nommé rapporteur adjoint, en 2007, d'une commission pour la croissance qu'Attali présidait lui-même ? "On dit, à tort, que je soutiens Emmanuel Macron", assure l'économiste. "Il se trouve que cela a été mon collaborateur, comme François Hollande et d'autres."