De Rugy au Perchoir : des députés REM "pas féministes à tout prix"

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François de Rugy a été élu président de l'Assemblée nationale mardi. © Patrick KOVARIK / AFP
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François de Rugy a été élu président de l'Assemblée nationale mardi. Tandis qu'une partie de l'opposition a regretté que ce poste ne revienne pas à une femme, les élus REM ont défendu leur choix bec et ongle.

Mardi était une journée de premières fois à l'Assemblée nationale. Première séance dans l'Hémicycle pour de nombreux députés, notamment du groupe La République en marche! (REM), qui n'ont, pour beaucoup, jamais été élus auparavant. Première fois que les femmes sont aussi nombreuses au Palais Bourbon (225 sur 577, exactement). Premier vote de la quinzième législature, avec l'élection du successeur de Claude Bartolone à la présidence du Palais Bourbon.

Ce scrutin aurait pu ajouter une grande première à la liste, en permettant à une femme d'accéder au Perchoir. Mais c'est François de Rugy, ex-EELV rallié à Emmanuel Macron, qui a finalement été largement élu, avec 353 voix sur les 543 bulletins exprimés.

Occasion manquée.Sa victoire ne faisait aucun doute depuis qu'il avait été désigné, le matin même, lors d'un vote interne, comme candidat du groupe REM. Elle n'en a pas moins laissé l'impression d'une occasion ratée pour les députés macronistes. La semaine dernière, Christophe Castaner, ministre des Relations avec le Parlement, estimait en effet qu'élire une femme serait "un symbole fort". Et Marc Fesneau, président du groupe MoDem, allié du gouvernement, trouvait encore lundi l'idée "séduisante". Finalement, il faudra attendre pour être séduit par un symbole fort.

"On retrouve encore un homme". Dans la Salle des Quatre Colonnes, les députés de l'opposition ne se sont d'ailleurs pas privés de noter le hiatus entre les paroles et les actes. "Symboliquement, élire une femme aurait pu avoir un impact important", déclare Virginie Duby-Muller, vice-présidente du groupe LR. "À titre personnel, je le regrette."

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" Il y avait deux candidats hommes, deux candidates femmes. C'est ça, la parité. "
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Du côté de la France Insoumise, Mathilde Panot, élue dans le Val-de-Marne, y voit la "continuité" des décisions politiques d'Emmanuel Macron qui, déjà, n'a pas créé de ministère de plein exercice pour les Droits des femmes, comme il l'avait pourtant promis en campagne. "Le Premier ministre ? On avait parlé d'une femme, finalement c'est un homme. Le président du groupe [REM] ? C'est un homme aussi. Et là, on retrouve encore un homme au Perchoir." De fait, la présidence de l'Assemblée n'est pas le seul poste clef à avoir échappé à des mains féminines. Des sept groupes parlementaires constitués, aucun n'est présidé par une femme.

"Je ne suis pas féministe à tout prix". Les députés REM, eux, ont passé leur journée à défendre le choix de François de Rugy. "Je ne suis pas féministe à tout prix", balaie Claire O'Petit, élue de l'Eure, qui veut privilégier l'expérience et a donc voté pour l'ex-Europe Écologie-Les Verts, député depuis 2007. "Et pourtant, je n'aime pas les écologistes…" Le député du Maine-et-Loire Matthieu Orphelin, lui, souligne que le mouvement fondé par Emmanuel Macron a déjà beaucoup œuvré en faveur de la parité. "Il y a 47% de femmes dans notre groupe, on est les premiers à avoir une telle proportion parmi les groupes majoritaires."

Pour entendre l'argument n°1 des troupes d'Emmanuel Macron, il faut se tourner vers Sandrine Le Feur, députée du Finistère : "Il y avait deux candidats hommes [François de Rugy et Philippe Folliot], deux candidates femmes [Brigitte Bourguignon et Sophie Errante]", rappelle cette agricultrice de 26 ans. "C'est ça la parité." Bénédicte Peyrol, 26 ans aussi, députée de l'Allier, laisse néanmoins poindre le début d'un regret. "Forcément, on se dit qu'on aurait aimé aller plus loin dans la parité. Mais bon, François de Rugy fera vraiment un bon président." L'une des candidates malheureuses, Brigitte Bourguignon, a d'ailleurs reconnu au micro de LCP qu'il y avait "encore du travail à faire" du côté de la parité. "Je ne suis pas déçue pour moi, je suis déçue pour les femmes. Je me dis que nous avons peut-être raté un moment important."

 

 

François de Rugy largement élu

Le candidat au Perchoir de la REM a obtenu 353 voix, contre 94 pour Jean-Charles Taugourdeau (LR), 34 pour Laure de la Raudière (les élus de droite "constructifs"), 32 pour Laurence Dumont ("Nouvelle gauche", ex-PS) et 30 pour Carine Fiat (France Insoumise).

L'élection de François de Rugy a été l'occasion d'apprécier les rapports de force à l'Assemblée. Si la quasi-totalité de l'Hémicycle s'est levée pour applaudir son nouveau président, les élus Front national et France Insoumise, eux, sont restés ostensiblement assis et impassibles. Ironie du placement par ordre alphabétique, François de Rugy a pu apprécier le mécontentement de François Ruffin, installé juste à côté de lui.