Sarkozy chez Hollande, un air de campagne

Les deux hommes, qui pourraient s'affronter en 2012, ont eu un échange très républicain.
Les deux hommes, qui pourraient s'affronter en 2012, ont eu un échange très républicain. © REUTERS
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Corentin Bainier avec Stéphane Grand et agences , modifié à
Le président visitait une scierie sur les terres de François Hollande, et les petites phrases ont fusé.

Officiellement, Nicolas Sarkozy s’est rendu jeudi à Egletons en Corrèze pour visiter une scierie, parler de la filière du bois et valoriser la forêt de la région. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait, mais tout dans cette visite, la première en Corrèze depuis 2007, laissait penser à une pré-étape de campagne présidentielle.

 

Brevet de chiraquisme

 

Le lieu tout d’abord : la Corrèze est la terre électorale de Jacques Chirac. Les acteurs ensuite : Bernadette Chirac est conseillère générale du département. Elle a d’ailleurs accompagné Nicolas Sarkozy dans sa visite, celui-ci lui ayant "fait l’amitié" de l’inviter. Mais ce même Conseil général de Corrèze est aussi présidé par François Hollande, candidat déclaré aux primaires socialistes et qui a tenu mercredi son premier meeting

 

Le décor préélectoral était donc planté et François Hollande ne s’y est pas trompé. "Je veux croire d'abord que Nicolas Sarkozy vient pour exprimer une politique de la filière bois. Mais quand on vient en Corrèze, ce n'est jamais innocent. Parce que c'est un lieu où on forme les présidents", a estimé, souriant, l’ancien premier secrétaire du PS. Et d’ajouter : "je pense qu'il est là essentiellement pour s'adresser à un électorat qui lui a fait défaut, c'est l'électorat rural". Et quitte à en remettre une couche, le candidat aux primaires a lancé : "j’ai compris aussi qu'il venait pour recevoir un brevet de chiraquisme, mais ce n'est pas moi qui les délivre..."

Bernadette, la "bonne fée"

Nicolas Sarkozy, qui n’est pas officiellement candidat à sa propre succession, s’est lui bien gardé de toute déclaration laissant présager du caractère électoral de sa visite. Mais, au cours de sa marche en forêt, il était accompagné de Bernadette Chirac, envers laquelle il n’a pas manqué d’amabilité, lançant du "Bernadette" à tout va à celle qu’il appelle volontiers sa "bonne fée", depuis qu’elle lui a permis, peu avant l’élection de 2007 de se réconcilier avec Jacques Chirac.

 

Tancé au sein de l’UMP par les centristes comme par les chiraquiens, Nicolas Sarkozy avait donc tout intérêt à s’afficher en bonne entente avec la conseillère générale. Même si celle-ci tourne les talons quand il lui a été demandé si elle soutiendrait un Nicolas Sarkozy candidat.

Mais François Hollande lui-même ne s'est pas privé de revendiquer un héritage chiraquien. "Je pense qu'un chef de l'Etat, même si nous sommes à quelques mois d'une élection présidentielle, doit avoir un rapport au temps moins pressé", a déclaré François Hollande au micro d'Europe 1. "J'ai appris ça, non seulement de François Mitterrand qui disait qu'il fallait laisser du temps au temps, mais aussi de Jacques Chirac", a ajouté François Hollande.

Forêt et champignons

Au-delà des piques et des stratégies électorales, l’ambiance est restée sereine entre François Hollande et Nicolas Sarkozy. Au retour de la visite du chef de l’Etat en forêt, les deux hommes ont échangé une poignée de main franche. « Vous êtes allés en forêt? Vous avez trouvé des cèpes?", lui a demandé François Hollande. "Vous croyez que j'ai emmené Bernadette aux champignons?", lui a répondu Nicolas Sarkozy du tac au tac.

 

Mais devant les salariés de l’usine, le chef de l’Etat s’est fait plus offensif. Il a rappelé que laFrance « doit rester une terre de production". Il a défendu sa réforme des retraites ou la défiscalisation des heures supplémentaires.

 

"Je n'ai jamais cru au partage du travail. Ce n'est pas une affaire de majorité ou d'opposition, c'est une affaire de bon sens", a encore lancé le président, devant celui qui était premier secrétaire du PS au moment des 35 heures. Peut-être François Hollande aura-t-il l’occasion d’y répondre dans un an. S’il se retrouvait devant les électeurs face à son hôte du jour.