Roland Dumas : "Il faut discuter avec Bachar al-Assad"

  • Copié
, modifié à
INTERVIEW E1 - Roland Dumas, ancien ministre des Affaires Etrangères, estime que la France devrait avoir une position plus claire et affirmée sur la scène internationale.

Fabius "déçoit" Dumas. Il vient de sortir un livre au titre évocateur : Politiquement incorrect, aux éditions du Cherche midi. Du quai d'Orsay sous Mitterrand au Conseil Constitutionnel dans les années 1990, Roland Dumas a goûté aux ors de la République et aux affaires politico-médiatiques. Fort de son expérience et de sa liberté de ton, il n'a pas hésité à critiquer la politique extérieure française, et son principal artisan, Laurent Fabius.

>> LIRE AUSSI - Roland Dumas flingue les "farfelus du gouvernement"

"Le ministre des Affaires Etrangères me déçoit", a lâché Roland Dumas, qui explique que l'actuel ministre des Affaires Etrangères était meilleur à Matignon, lorsqu'il avait pris les rênes du gouvernement de François Mitterrand en 1984.

Dumas : "Le ministre des Affaires Etrangères me...par Europe1fr

Hollande "était un bon chef de cabinet". Un autre François, Hollande celui-là, a les faveurs de Roland Dumas. Et pour cause, les deux hommes se sont rencontrés il y a trente ans de cela. Tout juste sorti de l'ENA, l'actuel président de la République était alors le directeur de cabinet de Roland Dumas, porte-parole du gouvernement. "C'était un bon chef de cabinet !", se souvient l'invité de Thomas Sotto, qui affirme avoir participé au lancement en politique de François Hollande. "Un jour, il m'a demandé un rendez-vous : il voulait faire une carrière politique ! Je lui ai demandé où il avait ses attaches. J'étais député de Brive, la place de maire de Tulle venait de se libérer. Delors, qui avait aussi des attaches familiales dans la région, l'a soutenu", rappelle-t-il.

>> LIRE AUSSI - Hollande : "on verra si j'ai pris le bon chemin"

"Je me suis dit qu'il était fort". S'il ne s'attendait pas à le voir un jour à l'Elysée, Roland Dumas tenait François Hollande en haute estime. L'élément déclencheur de cette admiration ? "La façon dont il a mis dans sa poche la famille Chirac. Quand j'ai vu que Chirac ne parlait que de lui, je me suis dit qu'il était fort, une belle trouvaille." Sur son bilan présidentiel, Roland Dumas estime que "les expériences laissent penser que c'est un bon président" malgré "un démarrage difficile".

Dumas : "Je me suis dit qu’Hollande était fort"par Europe1fr

A contre-courant de la politique étrangère actuelle. Interrogé sur la politique extérieure française, Roland Dumas n'a pas mâché ses mots. Sur le front syrien notamment, il affirme qu'il est "plus que jamais" le moment de discuter avec Bachar al-Assad. "Je connaissais son père, je connais le chef d'Etat actuel, c'est l'homme qu'il convient d'avoir dans son jeu, celui sur qui il faudra compter."

>> LIRE AUSSI - Fabius : "el-Assad doit partir"

Une analyse qu'il étend à l'ensemble de la région : "Dans cette région, si vous n'avez pas affaire à des hommes forts, avec lesquels vous vous entendez pour gouverner, créer des équilibres, vous êtes perdus d'avance. L'idée d'installer dans ces pays la démocratie à l'occidentale était un peu une utopie, on le voit bien." Mais dialogue ne veut pas dire compromission, Roland Dumas rappelant "qu'il faut être très ferme".

Dumas : "Je discuterais avec Bachar plus que...par Europe1fr

Même son de cloche vis-à-vis de la Russie de Poutine, envers qui l'Europe et les Etats-Unis manquent selon lui de "clarté". "J'ai une certaine admiration pour Poutine. Vous trouvez normal que le chef de l'Etat russe ne soit pas invité aux manifestations à Auschwitz, alors que l'armée russe l'avait libéré ?". A bon entendeur. 

>> LIRE AUSSI - Poutine le fin stratège