Que sait-on des "trois Cahuzac" de l'UMP ?

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L'ESSENTIEL - Trois parlementaires UMP sont dans le viseur du fisc pour avoir omis de déclarer des comptes à l'étranger.

Les lois sur la transparence continuent à produire leurs effets : la justice est en effet  saisie du cas de trois parlementaires UMP : l'ex-maire de Cannes Bernard Brochand, le député Lucien Degauchy (Oise) et le sénateur Bruno Sido, président du conseil général de la Haute-Marne. Europe1.fr vous résume cette histoire, que certains comparent déjà à l'affaire Cahuzac.

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• Que leur est-il reproché ?

"Il existe un doute sérieux quant à l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité de leurs déclarations de situation patrimoniale", a expliqué jeudi la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Ces trois élus ont omis de déclarer des avoirs détenus à l'étranger, et deux enquêtes préliminaires sont déjà lancées. Ces investigations, confiées à l'Office anticorruption de la PJ, concernent Lucien Degauchy et Bruno Sido. Le parquet de Paris n'a pour l'heure pas pris de décision concernant Bernard Brochand, dont le signalement par la Haute autorité sur la transparence de la vie publique (HATVP) a été reçu jeudi.

• Quelle est leur ligne de défense ?

Invité vendredi matin d'Europe 1, Bernard Brochand  a assuré que, le concernant, "il n'y a aucune anormalité, aucune fraude, aucune tricherie sur des éléments que j'ai moi-même déclarés à la Haute autorité. Avant de m'engager en politique, j'ai travaillé dans le privé. J'étais à la tête de la première agence de publicité du monde, qui était dans 140 pays. J'avais donc un compte à l'étranger, déclaré en France, avec des impôts payés en France. Les dépôts d'argent gagnés par mon travail – et non pas par autre chose, effectué sur ce compte dans les années 70 ont été soumis à l'impôt français." Et de conclure : "Ma situation est donc claire, légale et honnête.

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Bruno Sido, exploitant agricole de profession, a quant à lui publié un communiqué avant même l'annonce de la décision de la Haute autorité, a reconnu avoir omis, dans une déclaration de patrimoine remontant à 2011, l'existence d'un "compte à la banque cantonale vaudoise", dont il avait hérité en partie, qui représente moins de 5% de son patrimoine et pour lequel il a procédé à une régularisation en 2013. "Il ne s'agit en aucune façon d'argent public, ni d'un sujet lié à ses mandats électifs, mais au contraire d'une question d'ordre familial et privé", selon sa défense.

Quant à Lucien Degauchy, il avait reconnu dès fin octobre dans Le Monde un compte non déclaré depuis 1981 en Suisse, mais considérait que ces 100.000 euros provisionnés, issus de son père maraîcher, étaient réservés à ses enfants. En 2013, "j'ai régularisé la situation, payé les droits et les pénalités - près de 30 % - et j'ai fermé ce compte. Aujourd'hui, on me reproche de ne pas l'avoir déclaré plus tôt", expliquait-il.

Que risquent-ils ?

S'ils ont rapatrié leur argent en France en payant des pénalités, les trois élus ne sont pas pour autant en règle avec la loi française. Depuis 1988, les parlementaires ont en effet obligation de déclarer leur patrimoine. Jusqu'en 20111, les oublis n'étaient passibles d'aucune sanction mais ce n'est plus le cas aujourd'hui. Désormais, cette infraction pénale est passible de trois ans de prison, de 45.000 euros d'amende et 10 ans d'inéligibilité.

• Des appels à la démission

La décision de la haute autorité "ne peut rester sans conséquences" pour Bruno Le Roux. Selon le patron des députés socialistes, face à de tels manquements, il n'y a qu'une attitude possible : la mise à l'écart du groupe auxquels ils appartiennent et la démission de tous les mandats électifs".

 Il n'est pas le seul à réclamer une sanction à l'encontre des députés concernés. Après avoir rappelé ironiquement que "le PS demande leur démission alors qu'ils n'ont pas réussi à le faire pour Thomas Thévénoud", la député FN Marion Maréchal-Le Pen a elle aussi estimé que "s'il y a eu dissimulation, il est honnête que ces parlementaires quittent leur parti". Contacté vendredi matin par Europe 1, Gerald Darmanin, porte-parole de la campagne de Nicolas Sarkozy, a rappelé que "la présomption d'innocence est très importante dans notre pays. Là, on a des gens qui ont des explications à avoir avec la justice, mais on ne va pas comparer les coupables avec ceux qui sont suspectés d'être coupables."

Et demain ?

Ces trois élus ne sont pas les seuls que la loi sur la transparence a épinglés. Un autre député UMP a ainsi des échanges nourris avec le fisc à la suite de sa déclaration : le président de la commission des Finances Gilles Carrez, qui risque un redressement fiscal en raison du non-paiement de l'impôt de solidarité sur la fortune. Selon Le Canard enchaîné, une soixantaine des 925 députés et sénateurs seraient en délicatesse avec le fisc, "du petit différend au gros redressement", et seraient soumis à une procédure de recoupement entre leurs déclarations et les impôts qu'ils règlent.