Pakistan : le bras de fer entre Bhutto et l'armée se poursuit

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
L'ancien Premier ministre du Pakistan, "assignée à résidence" pour la journée de vendredi dans sa maison d'Islamabad par l'armée, a de nouveau obtenu le droit d'aller et venir à sa guise. En jeu dans l'immédiat, l'organisation d'un meeting de protestation contre l'état d'urgence décrété par le président Pervez Musharraf dans le pays. Mais au-delà, c'est la question des élections et du partage du pouvoir à venir qui agite le Pakistan.

Opération médiatique ou combat sincère pour "sauver" ceux qui veulent la démocratie au Pakistan : c'est un curieux bras de fer qui a eu lieu vendredi aux alentours de la résidence de Benazir Bhutto à Islamabad au Pakistan. L'ex-Premier ministre du Pakistan a été "assignée à résidence" une bonne partie de la journée, afin de l'empêcher de présider dans l'après-midi un rassemblement de son parti à Rawalpindi, interdit par l'état d'urgence. Sa maison a été encerclée par des fils barbelés et personne ne pouvait en apparence s'en approcher. Mais Benazir Bhutto a quand même pris la parole par téléphone et a longuement posé devant les caméras et les appareils photos.

"Je ne veux pas que le Pakistan devienne l'Irak, je dois vous sauver", a-t-elle crié dans un mégaphone à ses partisans, aux policiers et aux innombrables journalistes, avant de rentrer chez elle. "Ces manoeuvres ne me font pas peur. Je me bats pour le peuple pakistanais, pour ses droits et pour mettre fin à la dictature", a affirmé Benazir Bhutto. Les forces de l'ordre ont invoqué dès jeudi l'interdiction de tout rassemblement par l'état d'urgence, mais surtout des "menaces très précises" d'attaques terroristes. L'attentat suicide le plus meurtrier de l'histoire du Pakistan a visé Benazir Bhutto le 18 octobre, faisant 139 morts.

Mais au-delà de cette assignation à résidence, des raisons de sécurité et des meetings de protestation, c'est la question du partage du pouvoir, avec les élections à venir en début d'année prochaine, qui est en jeu. Jeudi, le président Pervez Musharraf avait annoncé, sous la pression de la rue et de Washington, que les législatives, initialement prévues pour la mi-janvier, auraient lieu avant le 15 février. Mais Benazir Bhutto, qui a parlé d'"annonce vague" et a réclamé une date précise, a annoncé qu'elle maintenait le rassemblement prévu. Elle est rentrée au Pakistan le 18 octobre après 8 ans d'exil volontaire, après que le chef de l'Etat l'eut amnistiée d'accusations de corruption pour détournements de fonds quand elle était Premier ministre. L'accord prévoyait qu'elle redevienne Premier ministre en échange d'un soutien du PPP à M. Musharraf aux législatives. Les Etats-Unis soutiennent de manière à peine voilée un ticket Musharraf-Bhutto dans ce pays qui est leur allié-clé dans leur "guerre contre le terrorisme".