Les candidats veulent tous leur téléphérique

© REUTERS
  • Copié
, modifié à
ARGUMENT DE SÉDUCTION - A l’approche des élections municipales, de nombreux projets de téléphériques urbains fleurissent.

Le tramway ? C’est dépassé. Le métro ? Creuser sous terre, vous n’y pensez pas, totalement "has been". La dernière mode, c’est le... téléphérique. A un mois des élections municipales, de nombreux candidats l’ont inscrit dans leur programme. Pour tenter de se démarquer. A Brest, Toulouse, Paris, Créteil, Lyon, Grenoble ou Nancy, les projets fleurissent. Mais ce nouveau mode de transport urbain relève-t-il simplement du gadget électoral ou est-ce le bus du futur ? Montez à bord pour voir.

Téléphérique-Brest

© Futur téléphérique de Brest

Brest sera la pionnière. Pour franchir le fleuve Penfeld, les Brestois prendront bientôt une télécabine perchée à 60 mètres au-dessus de l’eau. A raison de 120 dans chaque cabine, ce sont plus de 1.200 personnes par heure qui pourront rallier les deux rives à partir de 2015. Jusque là, seuls deux ponts permettaient aux voyageurs de se déplacer entre le centre-ville et le quartier populaire de la Recouvrance. Pour diminuer les embouteillages, la solution la moins polluante et la moins coûteuse, c’est bien ici le téléphérique. Entre l’investissement de 18 millions d’euros pour ce projet et les 45 nécessaires pour construire un nouveau pont, le choix a été vite fait.

Le maire PS sortant François Cuillandre met en avant ce projet pendant la campagne électorale. De bonne guerre durant une telle période. A Toulouse, le maire sortant (PS lui aussi) Pierre Cohen mise beaucoup sur les transports pour sa réélection. Et lui aussi a lancé un projet de téléphérique urbain. Son "Aérotram" (plus chic comme appellation) devrait relier l’Oncopole et l’université Paul Sabatier en 2017. "On est dans une logique de diversification des modes de transport", justifie Joël Carreiras, président de la Commission transports et déplacements du Grand Toulouse. "On connaît le bus traditionnel, on a le tramway, on a le métro. Cette nouvelle expérience se justifie par la topographie du site". A Toulouse aussi, la mairie en place justifie les économies réalisées avec ce type de projet.

Efficace... "quand il y a du relief"

Construire un téléphérique urbain coûte moins cher mais, car il y a un mais, "ce genre d’infrastructures permet de faire voyager très peu de monde", prévient de son côté Yves Crozet, professeur à Sciences-Po Lyon et membre du Laboratoire d’économie des transports. "A Montpellier, le tramway transporte 120.000 personnes par jour. On ne peut pas faire ça avec un téléphérique. En revanche, ça peut être très utile sur des tronçons avec un relief bien particulier". Un bon point donc pour Toulouse et Brest. 

Téléphérique-Toulouse

© Projet pour l'Aérotram à Toulouse

Pour les Jeux olympiques de 2012, la ville de Londres s’était offert son "Emirates Air Line", 34 cabines perchées à 90 mètres au-dessus de la Tamise. Avant Londres, Barcelone a eu ses télécabines au-dessus de Montjuïc, mais aussi New York, Rio ou encore Alger. Et Paris ? Bientôt peut-être.

"Un gadget de campagne en période de vaches maigres"

La candidate socialiste Anne Hidalgo l’a en tout cas inscrit dans son programme. Un tram des airs qui relierait la gare d’Austerlitz à celle de Lyon, de l'autre côté de la Seine. Le téléphérique, "c’est à la mode, comme le tramway l’a été", avoue Jean-Louis Missika, directeur de campagne d’Anne Hidalgo qui brandit l’argument écologique pour justifier le projet. "Il faut explorer toutes les technologies innovantes de transport collectif pour en finir définitivement avec le diesel. Aujourd’hui, le mode de transport en surface le plus courant à Paris, c’est le bus au diesel. Il faut en finir avec ça".

La thèse écologique ne semble pas convaincre tout le monde. "A Paris, ça relève vraiment du gadget de campagne. Un gadget qui est d’ailleurs très révélateur de la période", analyse encore Yves Crozet, professeur à Sciences-Po Lyon. "En période de vaches maigres, les candidats doivent limiter leurs prévisions de dépenses et présentent des projets moins chers. On en parle d’autant plus de ces gadgets qu’ils ne coûtent pas grand-chose".

Téléphérique-Créteil

© Le téléphérique (Le Téléval) permettra de relier Créteil à Villeneuve-Saint-Georges en 15 minutes.

Si le téléphérique urbain rencontre donc des détracteurs, la liste des villes candidates s’allonge de jour en jour. Après Brest et Toulouse, Créteil, Paris, Lyon, Nancy ou Grenoble mais aussi Béziers et Poitiers y pensent.

Dernier arrêt à Toulouse. La campagne électorale n'enthousiasme pas grand monde dans la Ville rose. L’ancien socialiste, aujourd’hui candidat "divers gauche" à la mairie, Jean-Pierre Plancade, a trouvé une idée pour réveiller les Toulousains : le "Sky Tran". Grâce à des nacelles suspendues (de 2 à 4 places) qui se déplacent à plus de 100 km/h en utilisant le champ électromagnétique, ce sénateur veut "diminuer les embouteillages autour du périphérique".

On se croirait en plein film de science-fiction et pourtant, c’est réel et surtout très actuel. Jean-Pierre Plancade étant crédité de 2% des intentions de vote au premier tour à Toulouse lors du dernier sondage, ce projet a peu de chances de voir le jour rapidement. Mais une chose est sûre, un jour, notre bon vieux bus à accordéon sera une antiquité.