"Il ne s'agit pas du tout de faire l'aumône", a souligné François Fillon. "Il s'agit de faire fonctionner normalement une solidarité qui est l'honneur de la République". C'est le message qu'a voulu faire passer le Premier ministre lors de sa visite-éclair mercredi à la Martinique et en Guadeloupe. Après une première visite au lendemain du cyclone Dean, le secrétaire d'Etat à l'Outre-Mer, Christian Estrosi, avait évoqué une fourchette de 170 à 250 millions d'euros de dégâts, un chiffre que certains acteurs locaux jugent sous-estimé, fixant à 200 millions d'euros la facture pour la seule filière bananière. Le chef du gouvernement n'a lui pas souhaité annoncer une enveloppe budgétaire avant l'évaluation des dégâts. Les experts chargés de cette évaluation doivent rendre leurs estimations "dans les meilleurs délais". Pour François Fillon, il n'y a ni "doute ni hésitation", tous les territoires qui ont été frappés par Dean seront classés en état de catastrophe naturelle. Il a enjoint aux maires de deux îles de constituer leurs dossiers le plus rapidement possibles pour les soumettre à la commission nationale qui doit se réunir le 22 septembre. Le ministre de l'Agriculture doit venir constater les dégâts la semaine prochaine, le secteur de la banane, l'une des principales productions agricoles des deux îles, a été le plus durement touché. Une délégation d'élus des deux îles s'entretiendra par ailleurs mercredi prochain avec Nicolas Sarkozy pour faire le point sur les aides d'urgence et parler également de "mesures structurelles" pour les DOM à plus long terme. Selon François Fillon, le chef de l'Etat évoquera notamment avec eux la question d'une zone franche globale, une exonération fiscale, qu'il avait lancée pendant la campagne présidentielle. Comme toute décision modifiant le régime fiscal, la mesure doit avoir l'aval de Bruxelles. Lors d'un point de presse à Fort-de-France, le Premier ministre s'est déclaré "raisonnablement optimiste". "On amènera M. Barroso à la Martinique et il comprendra", a-t-il glissé dans un sourire. Dans la matinée, François Fillon avait survolé en hélicoptère la Martinique pour constater de visu l'ampleur des dommages causés par Dean, le cyclone le plus violent à frapper l'île en vingt ans. Des rafales de plus de 200 km/h ont eu raison des plantations de bananes, dont les tiges herbacées ne résistent pas à des vents supérieurs à 75km/h. "Je ne suis pas venu pour faire des effets d'annonce ou simplement pour exprimer de la compassion. Je suis venu là pour mettre en place un programme de reconstruction et de réparation de la Martinique", a-t-il déclaré au cours d'une rencontre avec les élus du sud de l'île à Rivière-Pilote, une des communes les plus durement touchées en Martinique. François Fillon a promis que la solidarité nationale jouerait à plein pour tous les secteurs frappés par la catastrophe: productions agricoles, pêche et tourisme. Dans ce dernier domaine, tous doivent participer à une "communication positive" avant le début de la haute saison, fin octobre. Pour les "situations les plus graves", un fonds d'urgence géré par le préfet ne sera "pas limité" et sera abondé "autant que de besoin". Pour tous les dégâts qui ne seront pas pris en charge par les assureurs privés, le fonds de secours du secrétariat d'Etat à l'Outre-Mer ne sera pas doté d'une enveloppe mais en fonction des besoins évalués "auquel vont s'ajouter je l'espère des fonds européens". Le Premier ministre a promis de revenir aux Antilles françaises "avant la fin de l'année pour constater et vérifier que tout ce que nous avons dit ensemble a bien été mis en oeuvre". Cette nouvelle visite pourrait avoir lieu en novembre ou en décembre. Lors de son passage sur la Martinique, Dean a causé la mort de deux personnes. Le cyclone a frappé les Caraïbes, Haïti, la Jamaïque, la République Dominicaine et la péninsule du Yucatan. Dean a été reclassé en tempête tropicale après avoir de nouveau atteint la côte mexicaine mercredi dans l'Etat de Veracruz, mais la violence des vents et les pluies torrentielles ont fait deux morts et contraint des milliers d'habitants à se réfugier dans des abris.