Elisabeth Borrel sera reçue à l'Elysée

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
La veuve du juge Bernard Borrel, retrouvé mort à Djibouti en 1995, sera reçue à l'Elysée conformément à sa demande. Elle a tenu mercredi matin une conférence de presse, où elle a indiqué avoir envoyé une lettre au président de la République. Elle souhaite que Nicolas Sarkozy lui garantisse que l'enquête sera menée à bien sans entraves.

"Le président comprend la détresse de Mme Borrel et salue son courage. De façon générale il veillera à ce que la justice puisse passer en toute indépendance", a déclaré David Martinon, porte-parole de Nicolas Sarkozy. "Mme Borrel sera bien sûr reçue à l'Elysée", a-t-il ajouté. Elisabeth Borrel a demandé une audience au président pour qu'il lui garantisse que l'enquête sur la mort de son mari sera menée à bien, sans entraves. "En votre qualité de chef de l'Etat français et de président du Conseil supérieur de la magistrature, garant à la fois de la souveraineté de la France à l'égard des puissances étrangères et de l'indépendance de l'autorité judiciaire, je vous demande de me recevoir, en présence de mes avocats", écrit-elle dans une lettre au chef de l'Etat remise à la presse. "Je vous demande de prendre auprès de moi l'engagement de faire respecter les principes qui seuls permettront l'aboutissement de mon combat pour que soient connus et punis les assassins de mon mari", ajoute-t-elle. Le procureur général de Djibouti a violemment condamné mercredi cette nouvelle démarche d'Elisabeth Borrel. Dans un communiqué, Djama Souleiman Ali dénonce "le climat de gangstérisme judiciaire et de terrorisme médiatique entretenus par la partie civile et les syndicats de magistrats autour de l'instruction de l'affaire Borrel". Le corps carbonisé de Bernard Borrel, coopérant français et conseiller technique auprès du ministère de la Justice djiboutien, a été retrouvé en octobre 1995. L'hypothèse du suicide a d'abord été retenue, mais la piste criminelle est désormais suivie, après notamment des expertises médico-légales. La demande au président Nicolas Sarkozy fait suite à la publication dans la presse ces derniers jours de documents trouvés lors de perquisitions au Quai d'Orsay et au ministère de la Justice, qui montrent que ce ministère a cherché en 2004 à faire transmettre l'ensemble du dossier criminel Borrel aux autorités de Djibouti, pourtant soupçonnées du meurtre. D'autres documents montrent que Paris a suggéré à Djibouti d'attaquer la France devant la Cour internationale de justice (CIJ) pour protester contre le refus de transmission du dossier, finalement opposé à Djibouti par la juge d'instruction Sophie Clément, en février 2005. L'affaire est d'importance pour Paris, qui possède à Djibouti sa principale base militaire en Afrique. Me Olivier Morice, avocat d'Elisabeth Borrel, a estimé que l'ancien président Jacques Chirac, qui avait refusé de recevoir la veuve du magistrat, avait fait primer ces intérêts diplomatiques sur la marche de la justice. "Il y a eu manifestement des accords passés entre les deux présidents Jacques Chirac et (son homologue djiboutien) Ismaël Omar Guelleh", estime l'avocat. Il a précisé cependant qu'il ne demanderait pas pour l'instant l'audition comme témoin de l'ex-président français. Selon Me Morice, Nicolas Sarkozy doit rompre avec l'attitude de son prédécesseur. "Nous voulons rappeler que Nicolas Sarkozy, comme candidat, a souligné qu'il ne fallait pas mettre sur le même plan les victimes et ceux qui sont des criminels", a-t-il dit.Le Syndicat de la magistrature (gauche) soutient la démarche. Cette affaire, qui empoisonne les relations entre la justice et le pouvoir depuis des années, fait l'objet de trois instructions distinctes, dont une pour "pressions sur la justice" qui a conduit deux juges d'instruction à tenter en vain de perquisitionner au palais de l'Elysée le 2 mai dernier. L'enquête principale sur le crime est au point mort depuis la délivrance en octobre 2006 de mandats d'arrêt contre deux repris de justice en fuite, soupçonnés d'être des exécutants du meurtre de Bernard Borrel. La juge Clément a convoqué en vain comme témoin le président djiboutien, de passage à Cannes en février dernier pour un sommet franco-africain. Ce chef d'Etat, qui nie toute implication, est mis en cause principalement par un témoin, qui déclare qu'il a parlé du meurtre du juge avec d'autres personnes le soir des faits. Cette déposition est qualifiée de douteuse par sa défense car certains éléments en ont été infirmés ou semblent sujet à caution.