Crise : les candidats PS donnent de la voix

Les candidats à la primaire socialiste ont cherché à se démarquer en évoquant la crise boursière.
Les candidats à la primaire socialiste ont cherché à se démarquer en évoquant la crise boursière. © MAXPPP REUTERS
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Tous les candidats à la candidature ont profité de la crise boursière pour avancer leurs pions.

A six semaines de l’échéance, les candidats à la primaire socialiste (7 et 16 octobre prochains) en vue de l’élection présidentielle commencent à s’agiter. Et malgré la période estivale, ils n’ont pas manqué l’occasion donnée par la crise boursière pour exister médiatiquement et se démarquer de leurs rivaux. Tous se sont exprimés longuement, mais sous des formes différentes, choisissant avec soin leur angle d'attaque.

Martine Aubry a ainsi répété sa priorité, si d’aventure elle était élue à l’Elysée : une grande réforme fiscale pour relancer une économie française mal en point. La maire de Lille, favorite avec François Hollande de la primaire socialiste, détaille quelques mesures dans une tribune au Monde daté de vendredi : une plus grande taxation des revenus du capital, la suppression de cadeaux fiscaux pour les riches, la suppression des heures supplémentaires défiscalisées, l’ajustement de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’utilisation des bénéfices… de quoi esquisser, déjà, un programme présidentiel. La maire de Lille a indiqué vendredi qu'elle était prête à se rendre à l'Elysée pour débattre de ces questions avec Nicolas Sarkozy. Sans illusions. "Mais vous savez, cela ne se fait pas beaucoup dans notre pays : la démocratie, l'ouverture, la discussion avec les autres, ça devient aujourd'hui extrêmement difficile, je le regrette, surtout quand le pays va mal", a-t-elle déclaré sur France Info.

De son côté, François Hollande a vanté son Rêve français, son livre à paraître le 25 août. Par un heureux hasard de calendrier, Le Point publiait jeudi les "bonnes feuilles" de l’ouvrage de l’ex-premier secrétaire du PS, dont l’économie est le fil rouge. Pour lui, la crise financière est d’abord… politique. "Il faut arrêter de raconter des histoires ! Quand les Etats-Unis mettent plusieurs jours à accoucher d'un accord déjà bancal, quand il faut plus de 18 mois à l'Union européenne pour traiter un problème certes sérieux, celui de la Grèce, mais qui n'est pas grand-chose à l'aune de nos moyens, c'est bien un problème politique que les agences de notation sanctionnent", écrit le président du Conseil général de Corrèze. Ses solutions : "quand le marché fait de l'argent en dormant, il faut le taxer", dit le député, qui invite aussi l'Union européenne à "s'en prendre aux paradis fiscaux, aux agences de notation, aux bonus bancaires, aux produits dérivés".

Ségolène Royal a, elle, entonné un refrain déjà utilisé lors de la campagne de 2007 : celui de l’"ordre juste". Avec cette fois un ajout, puisque la présidente de Poitou-Charentes a plaidé mercredi au siège du PS pour "un ordre international juste, dénonçant "au niveau national, européen, mondial, l'inertie et le manque de courage" des dirigeants. "J'appelle chacun, et tous ceux qui ont des responsabilités politiques et publiques à la tête des Etats et des gouvernements, à faire en sorte que la nouvelle crise actuelle nous permette de déboucher sur la mise en place d'un ordre international juste où l'on remet en ordre ce qui aujourd'hui est en désordre", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse au siège du parti. Selon Ségolène Royal, "nous payons en 2011 le prix et l'inertie et de l'absence de mesure adéquate au moment de la crise de 2008"

Arnaud Montebourg a, lui, soigné son image de candidat le plus radical du lot. Évoquant un bras de fer, une lutte très dure entre le pouvoir financier et les Etats, le député de Saône-et-Loire s’est voulu agressif dans un entretien accordé vendredi à Liberation.fr. "Il n'y a plus d'autres choix que des mesures dirigistes et de prohibition. Le moment n'est plus à la régulation, qu'il aurait fallu faire il y a quinze ans", a-t-il estimé. "Nous sommes engagés dans un conflit ouvert et nous avons un arsenal juridique à notre disposition qu'il revient aux responsables politiques d'utiliser et mettre en œuvre : démantèlement des agences de notation, interdiction de la spéculation sur les marchés financiers pour tout établissement bancaire qui dispose d'une licence sur notre territoire et ses filiales". "Enfin, il faut mutualiser chaque dette publique nationale des Etats de la zone euro due à la crise, dans une agence européenne chargée de racheter cette dette", a proposé Arnaud Montebourg.

Jean-Michel Baylet a pour sa part décidé de lancer un appel à une "Union sacré des Républicains contre les spéculateurs". Pour cela, le président du Parti radical de gauche (PRG) a demandé mercredi par communiqué "que le président de la République consulte les chefs des partis représentés au Parlement le plus rapidement possible pour leur présenter la réalité de la situation financière de la France et de l'Europe, et recueillir leur sentiment sur la politique à conduire". Jean-Michel Baylet s’en est aussi pris à la Banque centrale européenne (BCE) et à son président Jean-Claude Trichet, coupable à ses yeux d’avoir enjoint aux Etats européens de réduire drastiquement leurs déficits. "Ces déclarations ne sont pas admissibles. La BCE n'a pas à lancer publiquement de tels ultimatums aux Etats. Ce petit jeu de cache-cache entre la BCE et les gouvernements ne fait qu'approfondir le discrédit de la zone euro", a écrit le président du PRG. Jean-Michel Baylet a également dénoncé vendredi sur Europe 1 "les péripéties de la vie quotidienne des marché et du système libéral que nous avons accepté et que nous subissons."

Enfin, Manuel Valls a appelé à une toute autre sorte d’union sacrée. "Vu l'ampleur de la situation, je propose avant l'Université d'été de La Rochelle, une rencontre entre les (six) candidats à la primaire pour analyser, ensemble, ce contexte", a estimé le candidat dans une interview publiée vendredi sur Liberation.fr. Le député-maire d’Evry, donné quatrième dans les dernières études d’opinion, a aussi glissé quelques propositions pour relancer la machine : une hausse de la TVA, et "revenir sur la réforme de l'ISF, sur la baisse de la TVA dans la restauration".

Le voeu de Manuel Valls a d'ailleurs été entendu. Harlem Désir, premier secrétaire par intérim du Parti socialiste, a déclaré vendredi que le bureau national du parti prévu le 23 août serait "un bureau exceptionnel consacré à la crise"